Le vendredi 26 novembre marquait la date officielle du « Black Friday », « vendredi noir », cet événement commercial qui a eu lieu la semaine suivant Thanksgiving. Aux Etats-Unis, les magasin ont profité de lóccasion pour se débarrasser des stocks d’invendus après cette fête familiale très importante. En Europe, ils permettent aux commerçants de combler le creux d’activité précédant la période de fin d’année, tout en profitant aux consommateurs malins qui veulent déjà préparer les fêtes.
Dans la pratique, les prix cassés et les premiers achats de Noël ont déjà débuté depuis une petite semaine en France, mais de manière peut-être un brin plus discrète qu’à l’accoutumée. Il est loin le psychodrame commercialo-politique de l’an dernier, qui avait entraîné le report d’une semaine du Black Friday, accusé de ruiner les commerçants après les longues périodes de fermeture obligatoire, sur intervention du ministre de l’Economie lui-même.
Cette année, le climat est différent. Les commerçants, ravis de revoir leur clientèle après plus de sept mois de fermeture et de nombreuses incertitudes sanitaires, commencent tout juste à retrouver leurs chiffres pré-Covid (le mois d’octobre 2021 se situe au même niveau que celui de 2019). Mais la pandémie et les menaces de restrictions qui l’accompagnent ne sont pas terminées. Et il faut désormais jongler avec une économie mondiale grippée : les pénuries de matières premières se multiplient et le transport maritime est embouteillé, conduisant à des stocks plus faibles dans les entrepôts.
« Les bonnes affaires seront rares »
« On aura un Black Friday moins fort que d’habitude », dit Samih Khalef, directeur de la marque de chaussures Asics pour la France. Face aux fermetures d’usines en Asie, en particulier au Vietnam, il concède :« De nombreux produits manqueront dans les mois à venir, et ça continuera au moins sur les six premiers mois de 2022. On a concentré notre production sur les best-sellers et on va réduire les opérations de promotion. »
Il n’est pas le seul. Le géant Nike a admis anticiper des pénuries de baskets dans les prochains mois. En vue du Black Friday, « les clients ne trouveront pas forcément leur premier choix », prévient Richard Johnson, le patron de la chaîne de chaussures de sport Foot Locker. « Ce sont surtout les produits d’entrée de gamme qui vont manquer, pointe Frank Boehly, président de la Fédération des Enseignes de la Chaussure. Dans certains magasins, il y a déjà de 30 % à 40 % de références en moins ! »
Les difficultés pourraient être telles que le cabinet Euler Hermes annonce que « les bonnes affaires seront rares pour le Black Friday ». En cause, l’offre contrainte liée aux perturbations des chaînes d’approvisionnement, les stocks faibles, ou encore des réductions appliquées sur des prix qui ont déjà augmenté. Outre-Atlantique, les consommateurs devront ainsi, selon le cabinet, payer les vêtements 10 % de plus qu’en 2020, les appareils ménagers 12 % de plus, les meubles 14 % et les téléviseurs 17 % supplémentaires.
Du côté du commerce français, on se montre plus mesuré. « Il ne faut pas se faire peur : il n’y aura pas de pénurie de produits pour le Black Friday, ni ensuite, pour les fêtes de fin d’année », rassure Yohann Petiot, directeur général de l’Alliance du Commerce, qui représente à la fois les grands magasins et les enseignes de l’habillement et de la chaussure. « Cette année, le Black Friday devrait être plus classique – en 2020, il avait été reporté –, et c’est une bonne nouvelle pour les commerçants, parce que ça attire les gens en magasins et ça lance la période des fêtes. »
Le moment des cadeaux de Noël
« Après, on pourra observer des comportements différents en fonction des stocks de chaque magasin, nuance toutefois Emmanuel Le Roch, délégué général de la fédération Procos, représentant le commerce spécialisé. Une partie des commerçants pourraient être moins agressifs sur les promotions du fait de stocks plus faibles. »
Pour les consommateurs, le Black Friday s’est effectivement imposé comme le moment des courses de Noël. Et ce devrait être encore plus vrai cette année. D’après une étude du cabinet Boston Group Consulting (BCG), près de 40 % des Français ont prévu d’acheter des cadeaux à cette occasion. Au total, ils devraient dépenser près de 300 euros par personne. En haut de la liste d’achats, on retrouve d’abord l’électronique (28 % des Français en ont acheté durant le Black Friday 2020, d’après une étude Dealabs), suivi de la mode (11 %), la déco (10,6 %) et les jouets (10 %).Une pénurie de jouets à Noël ? Ne paniquez pas, c’est faux (pour le moment)
Le retour de toute cette consommation peut apparaître comme une bonne nouvelle pour les commerçants. Rappelons qu’ils réalisent environ 20 % de leur chiffre d’affaires annuel entre la fin novembre et la fin janvier. Mais demeure une inconnue : le Covid fera-t-il peser de nouvelles restrictions d’ici là ? Lors de sa conférence ce jeudi, le ministre de la Santé Olivier Véran a tenu à rassurer : à ce stade, « aucune fermeture anticipée des commerces » n’est envisagée.