L’inflation reflue mais reste encore élevée. Conséquence : le SMIC connaîtra une nouvelle revalorisation soutenue le 1er janvier prochain, la huitième en trois ans, la dernière en date remontant au 1er mai. On connaîtra le chiffre exact mi-décembre, mais dans son rapport annuel le groupe d’experts indépendants chargé d’éclairer le gouvernement l’estime à 1,7 %. Comme les années précédentes, il exclut tout coup de pouce politique qui s’ajouterait à la revalorisation automatique.
Le salaire minimum légal horaire passerait alors de 11,52 à 11,71 euros brut (1.747,20 à 1.777 euros brut par mois à temps plein). Ce dont profitera directement un nombre inédit de salariés dans le secteur privé hors agriculture. Ils étaient 3,1 millions dans ce cas lors de la revalorisation du 1er janvier dernier, selon un chiffre du ministère du Travail dévoilé par le rapport. Soit plus d’un salarié sur six, 17,3 % exactement. C’est 5,3 points de pourcentage de plus qu’en 2021. Ou encore 1 point de plus que le précédent record de 2005.
« Sans précédent »
« Plus de 17 %, c’est sans précédent depuis au moins le début des années 1990 et cela peut encore augmenter », confirme le président du groupe d’experts, Gilbert Cette. Et de souligner les difficultés de gestion humaine que cela pose dans certaines entreprises, surtout les très petites, quand un senior expérimenté est rattrapé au niveau du salaire par un jeune embauché.
Si on atteint un tel niveau, c’est paradoxalement grâce à l’effet protecteur des formules de revalorisation du salaire minimum légal, puisqu’elles compensent l’inflation, même si cela souligne en creux le poids des bas salaires dans la pyramide des rémunérations en France.
De fait, à chaque fois que le SMIC horaire augmente, encore plus si les revalorisations en dehors du 1er janvier se succèdent comme cela a été le cas depuis 2021, certains minima de rémunération conventionnels se retrouvent en dessous. Les branches professionnelles ont alors obligation de remettre leurs grilles à niveau. Au dernier comptage, une quarantaine sont toujours en situation de non-conformité depuis le 1er mai, dont 11 sont particulièrement surveillées par le ministère du Travail .
+13,5 %
L’augmentation cumulée du SMIC depuis la revalorisation automatique du 1er janvier 2021 exclue
Le hic, c’est que si les minimas en dessous du SMIC revalorisé sont rehaussés, ceux qui sont rattrapés n’évoluent que progressivement, malgré les hausses de salaires négociées dans les entreprises. D’où un tassement des salaires au niveau du minimum légal – un « écrasement sans précédent » pour Gilbert Cette -, qui explique pourquoi de plus en plus de salariés sont directement concernés.
Femmes surreprésentées
« L’ampleur des revalorisations du SMIC est l’un des facteurs expliquant l’évolution de la part de bénéficiaires […] de même que le changement de la composition de la structure des salariés selon leur niveau de salaire, la répartition des niveaux de salaires par rapport aux minimas de branche, ou encore les calendriers et les contenus des négociations de ces minimas de branches », résument les experts dans leur rapport.
Parmi les 3,1 millions de salariés concernés par la revalorisation du 1er janvier 2023, 57,3 % étaient des femmes, qui représentent pourtant moins de la moitié des effectifs du privé. C’est 2 points de pourcentage de plus en un an. Cette augmentation est particulièrement marquante dans les entreprises de 10 salariés ou plus.
Temps partiels
La hausse est particulièrement notable dans les services (+3 points) avec quasiment 20 % des salariés concernés, dans le bâtiment (+2 points) à 11,1 % et dans l’industrie (+1,5 point) à 8,4 %.
La part des bénéficiaires reste beaucoup plus élevée pour les salariés à temps partiel, à 38,3 % contre 12,4 % pour ceux qui travaillent à temps plein, « dans la mesure où les intéressés sont plus fréquemment rémunérés à proximité du salaire minimum ».