Comme un air de déjà-vu. Le gouvernement maintient la pression sur les assureurs santé pour qu’ils limitent les hausses de prix l’an prochain. Se montrant peu convaincu par les justifications des organismes complémentaires, il leur demande plus de « transparence » et suggère aux Français de faire jouer la concurrence.
« Aucune explication sérieuse ne m’a été donnée pour […] expliquer [certaines hausses de tarifs] », fustige le ministre de la Santé, Aurélien Rousseau dans une déclaration publiée ce vendredi sur X (ex-Twitter), à l’issue d’une réunion avec les fédérations des grandes familles d’assureurs (sociétés d’assurances, mutuelles, institutions de prévoyance).
Hausse inattendue des dépenses de santé
Les assureurs n’ont pas tous dévoilé le prix de leurs couvertures santé pour l’an prochain. Cependant les cabinets Facts & Figures et Addactis prévoient une forte augmentation, de 8 % en moyenne après une hausse d’environ 5 % en 2023. Sur le marché des contrats santé d’entreprises (collectifs), AXA va par exemple appliquer des revalorisations moyennes de 11,4 %.
De quoi inquiéter l’exécutif à l’heure où l’inflation, même si elle baisse, continue de peser sur le pouvoir d’achat des Français. Ce vendredi, Aurélien Rousseau a dénoncé des hausses « inacceptables » pouvant « aller jusqu’à 12 % ».
« La dynamique des dépenses de santé est beaucoup plus forte que ce qui avait été projeté », plaide Eric Chenut, le patron de la Mutualité française, évoquant une hausse des remboursements de l’ordre de 6 % en santé, contre un peu moins de 3,5 % attendus.
Les Français ont déjà pu « rattraper » les soins dont ils n’avaient pas pu bénéficier avec la pandémie de Covid, mais il y a « un besoin de santé différent de ce qu’on connaissait avant la crise », estime le responsable mutualiste. Le gouvernement a aussi demandé aux assureurs de prendre en charge une part plus importante des frais de soins dentaires.
Les frais de gestion en question
Il n’empêche, pour Aurélien Rousseau, « si l’on peut expliquer une hausse de 5 à 7 % » des prix, « il serait bien trop facile de faire reposer la responsabilité » de la flambée de la facture sur la Sécurité sociale. Et le ministre d’appeler les assureurs à « la transparence ».
Laissant filtrer un certain agacement vis-à-vis des fédérations qui répugnent à parler des tarifs de leurs membres, le ministère explique que « la balle est dans leur camp ». Il demande aux assureurs de travailler sur les différents facteurs de hausses de prix. Notamment sur leurs frais de gestion.
Le mois dernier, le gendarme de l’assurance, l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, avait d’ailleurs appelé les assureurs à absorber une part de la hausse des tarifs d’assurance santé et dommages, en travaillant sur leur base de coûts. Une position jugée « politique » par certains assureurs, ulcérés par ces déclarations.
Soulignant que les dépenses de santé augmentent rapidement et de façon structurelle, la Mutualité se dit prête à travailler avec la Sécurité sociale sur la meilleure manière de réaliser des « gains d’efficience ». « Il y a des soins redondants, des soins qui ne sont pas faits au bon moment », glisse Eric Chenut.
Passer à la concurrence
Les coups de pression des autorités sur la profession sont réguliers. Notamment à l’approche des changements de tarifs. L’exécutif n’avait pas hésité à taxer exceptionnellement les complémentaires pendant la crise du Covid.
Mais ce rappel à l’ordre semble intervenir bien tard pour infléchir la tendance. D’autant qu’il n’épingle pas les hausses inférieures à 8 %. L’exécutif n’évoque pas de mesures de rétorsions vis-à-vis de ceux qui feraient flamber leurs prix.
Il se contente d’inviter les Français qui le souhaitent à changer d’assureur santé , sachant que pour les contrats individuels, c’est possible à tout moment depuis la fin 2020.
Dans cette veine, le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, a invité cette semaine les Français à « faire jouer la concurrence » pour obtenir des tarifs plus avantageux pour leurs contrats d’assurance, au sens large.