Pour la première fois depuis deux ans, les salaires rattrapent l’inflation. L’indice du salaire mensuel de base (SMB) dans les entreprises privées de 10 salariés et plus – hors agriculture – a progressé de 1 % au deuxième trimestre, selon les données provisoires publiées par le ministère du Travail (Dares). Sur un an, il augmente de 4,6 %.
Un rythme 0,2 point supérieur à celui de la hausse des prix à la consommation sur la même période, hors tabac, soit 4,4 %. Les bas salaires ont même bénéficié d’augmentations plus importantes encore, portées par la revalorisation automatique du SMIC et sa diffusion sur les minima de branches. Sur un an, l’indice du salaire de base des ouvriers et employés grimpe en effet de 5,1 %, soit 0,7 point de plus que l’inflation.
L’heure de la revanche a donc sonné pour les salariés qui l’année passée avaient dû se serrer la ceinture : en 2022, les salaires avaient augmenté, mais nettement moins que l’inflation . Le SMB (qui n’intègre pas les primes) avait progressé de 3,9 % pour des hausses de prix de 5,9 %, selon la Dares. Les employeurs avaient eu tendance à privilégier les primes non pérennes. Près de 5 millions de salariés avaient ainsi perçu la prime de partage de la valeur l’an dernier.
Les professions intermédiaires toujours perdantes
En période d’inflation, les salaires ont tendance à suivre avec retard les hausses de prix. Dès la rentrée 2022, les entreprises se sont retrouvées sous pression pour préserver le pouvoir d’achat des salariés. A regarder de près, tous les secteurs n’ont toutefois pas été logés à la même enseigne au cours des six premiers mois de l’année. Si les salaires dans l’industrie et le tertiaire ont été augmentés plus que l’inflation, ce n’est pas le cas dans le secteur de la construction (-0,3 %).
Par ailleurs, deux catégories professionnelles restent perdantes face au choc inflationniste : les professions intermédiaires et les cadres qui connaissent des évolutions de salaires moins rapides que les autres et ont dû se contenter respectivement d’augmentations de 4,3 % et 3,7 % sur un an. Les cadres peuvent toutefois souvent compter sur une part variable en complément.
Pic au second semestre
Dans sa note de conjoncture de juin, l’Insee prévoit une progression du SMB de 4,6 % cette année, à comparer à une inflation moyenne autour de 5 %. Selon plusieurs études, les budgets de négociations annuelles obligatoires pour 2023 afficheraient des augmentations allant de 4,7 % à 4,95 %. Cette année encore les fiches de paie devraient être arrondies avec des primes et autres dispositifs.
L’évolution des rémunérations est regardée de très près par les banques centrales, qui craignent qu’elle n’entretienne la hausse des prix au moment même où l’inflation commence à décélérer. A ce stade, les économistes ne voient pas de risque de spirale prix-salaires dans l’Hexagone.
« Dans nos prévisions, le pic des hausses de salaires devrait être atteint au second semestre », estimait toutefois en juin le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau dans une interview aux « Echos ». En toute logique, le ralentissement de l’inflation devrait conduire à davantage de modération salariale en 2024.