Réforme de l’assurance-chômage : pourquoi les syndicats font de la résistance

Le Conseil d'Etat a examiné jeudi la demande des syndicats de suspendre la réforme du calcul des allocations chômage entrée en vigueur le 1 er octobre. Il rendra sa décision d'ici à la fin de la semaine prochaine.


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Le Conseil d’Etat veut aller vite. Il rendra sa décision dès la semaine prochaine au sujet de la nouvelle demande de suspension du décret actant l’entrée en vigueur le 1er octobre de la réforme du mode de calcul des allocations chômage, dans l’attente d’un jugement au fond qui doit intervenir dans quelques semaines.

Ce décret a ceci de particulier qu’il est identique à celui suspendu en juin, à ceci près qu’il a retardé son entrée en vigueur du 1er juillet au 1er octobre. Les syndicats n’ont pas manqué de le faire remarquer au juge. « Le seul objet du décret est de vider de sa portée la suspension prononcée », a dénoncé l’avocat de l’Unsa, Cédric Uzan-Sarano. Il s’agit d’« un détournement de procédure, voire de pouvoir », a ajouté Antoine Lyon-Caen, conseil de la CGT, de Solidaires et de la FSU. « La suspension dure en principe jusqu’à l’arrêt au fond sauf à revenir devant le juge des référés expliquer que les circonstances ont changé et qu’il y a lieu à mettre fin à la suspension », a-t-il rappelé.

Marqueur fort du quinquennat

Pour relancer la réforme, il fallait une période d’observation suffisamment longue de la situation économique, ce qui a conduit à opter pour un nouveau décret, a avancé le directeur des affaires juridiques du ministère du Travail, Charles Touboul. L’argument convaincra-t-il le juge des référés ? En tout cas, cela a permis au gouvernement de s’assurer que la réforme de l’assurance-chômage entrerait bien en vigueur à l’automne, comme le souhaitait le chef de l’Etat, qui en a fait un marqueur fort de la fin de son quinquennat.

Le deuxième point de discussion a porté sur l’évolution de la situation de l’emploi, sur laquelle le gouvernement s’appuie pour justifier d’avoir passé outre la suspension. Le délégué général à l’emploi et à la formation professionnelle, Bruno Lucas, a énuméré les « éléments précis concordant déjà acquis » : baisse du taux de chômage présente et à venir selon l’Insee, mais aussi « la forte dynamique à la baisse » du nombre de demandeurs d’emploi n’ayant pas du tout travaillé dans le mois ainsi que celle de l’emploi salarié privé « qui a déjà dépassé le niveau d’avant la crise » et « des prévisions de nouvelles créations nettes en 2022 ».

Face au constat objectif de la reprise, les syndicats ont ciblé le fait que l’amélioration ne profitait pas de la même façon à tout le monde. Ils ont rappelé que le nombre de demandeurs d’emploi alternant travail et chômage (catégories B et C), ceux-là mêmes que cible de la réforme, n’a pas baissé pour l’instant.

Le troisième point portait sur le décalage d’entrée en vigueur de la réforme de l’assurance-chômage pour les chômeurs (1er octobre 2021) et pour les employeurs (1er septembre 2022), évoqué aussi dans la décision de suspension de juin dernier. La réforme s’applique toutefois aux entreprises dès à présent, puisque c’est leur utilisation des contrats courts d’ici à la fin de l’été 2022 qui déterminera le montant de l’éventuelle pénalité appliquée, et seulement pour deux mois puisque les règles actuelles de l’assurance-chômage arrivent à leur terme le 31 octobre 2022.

Décalage d’entrée en vigueur

Si « la période d’observation commence maintenant pour les entreprises », il n’y en aura pas pour les chômeurs puisque le nouveau calcul des allocations « va prendre en compte l’activité passée des demandeurs d’emploi » et non celle à compter de ce mois-ci, a répondu Patricia Ferrand, de la CFDT, par ailleurs vice-présidente de l’Unedic.

Elle a rappelé que les précaires avaient été particulièrement pénalisés par la crise sanitaire. « Même si en théorie, ils pouvaient bénéficier du chômage partiel, nombre de CDD se sont retrouvés au chômage tout court pendant la période et ont donc dû utiliser leurs droits à indemnisation. »


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