L’avenant sur les retraites complémentaires conclu en juillet entre le patronat et deux des trois confédérations, la CFDT et la CFTC, va entrer en vigueur début octobre. Seule la CFE-CGC a en effet annoncé son intention d’utiliser son droit d’opposition. Or pour que ce droit empêche qu’un accord s’applique, il faut représenter au moins 50 % des salariés, un seuil qui ne sera pas atteint.
Conséquence juridique et enjeu politique
L’avenir de l’accord était de fait dans les mains de FO . et le syndicat a décidé de ne pas faire valoir son droit d’opposition. Le secrétaire général de Force ouvrière, Yves Veyrier, a confirmé l’information révélée par le Parisien aux « Echos ». « La pandémie a impacté les recettes des régimes, on avait fait des propositions pour passer ce cap compliqué autrement qu’en pénalisant les pensionnés mais n’avons pas été suivis par les signataires de l’avenant », déplore le leader syndical.
Mais, ajoute-t-il, « une analyse juridique nous conduit à penser qu’en l’absence de respect de la trajectoire [si l’avenant est annulé, NDLR], nous ne serions plus tenus par l’ accord de 2019 et que les conséquences pour les pensionnés pourraient être plus raides » que celles de l’avenant. Une analyse que confirme également la CFDT. La CGT a pour sa part bien annoncé qu’elle ne signerait pas l’accord, mais n’a dit mot concernant une éventuelle opposition. Un sujet sur lequel le renoncement de FO lui permet de rester vague puisqu’en tout état de cause, une alliance avec la seule CFE-CGC ne permettrait pas de faire la maille.
A cette conséquence juridique d’une annulation de l’avenant de juillet, s’ajoute un enjeu politique. Chacun a en effet en tête le fait que les retraites vont constituer un des thèmes forts de la campagne présidentielle et que montrer un dialogue à l’arrêt là où le paritarisme a encore totalement la main pourrait affaiblir les régimes de retraite complémentaire.
« Le risque serait de donner la main à Emmanuel Macron », note un syndicaliste. Et de démarrer l’an prochain dans une ambiance « conflictuelle » les futures discussions sur l’avenir des retraites complémentaires, l’accord de 2019 arrivant à son terme en 2023, fait remarquer un autre syndicaliste.
Le scenario d’une sous-revalorisation
L’entrée en vigueur de l’avenant signifie que le conseil d’administration qui se tiendra le 7 octobre pour fixer le niveau de la revalorisation annuelle des pensions complémentaires pourra décider d’une sous-valorisation jusqu’à 0,5 point en deçà de l’inflation, signant une perte de pouvoir d’achat d’autant. C’est de fait ce scenario qui se dessine.
Elle devrait se situer « entre 1,5 % et 1,7 % » en fonction du taux définitif de hausse des prix, estime un syndicaliste un peu optimiste. La revalorisation devrait atteindre en réalité 0,9 % . car elle se base sur la prévision d’inflation de l’INSEE en juin. Une augmentation qui fera suite à une année blanche en 2020 pour cause de Covid .
Il y a deux ans, les gestionnaires se sont fixé une règle de conduite : piloter financièrement le régime sur quinze ans, en s’assurant d’avoir en permanence en réserve l’équivalent d’au moins six mois de versement de pensions. L’épidémie est venue heurter frontalement cette règle. Depuis quelque temps, « la situation s’améliore mais est-ce que ce sera suffisant pour faire autre chose que 0,5 point en deçà de l’inflation, c’est encore prématuré pour le dire », explique Frédéric Sève, en charge des retraites à la direction de la CFDT. Sachant que l’élargissement de l’amplitude vaut aussi à la hausse, ce qui pourrait permettre de faire l’exercice inverse en 2022.