Combattre les déserts médicaux, le renoncement aux soins et les inégalités sociales de santé : Emmanuel Macron avait promis pendant la campagne présidentielle de 2017 un meilleur accès aux soins et plus de prévention. Il s’était également engagé à conduire une réforme historique de l’hôpital, qui a tardé à voir le jour. Avec l’irruption du Covid, elle s’est transformée en « Ségur », un plan de financement massif annoncé il y a un an. Les autres chantiers ont en revanche perdu de la visibilité, à part celui du numérique en santé. Tour d’horizon non exhaustif des réformes engagées depuis 2017, avec Angèle Malâtre-Lansac et Laure Millet, qui ont réalisé pour l’Institut Montaigne, une fiche thématique sur le sujet.
· Améliorer l’accès aux soins
Avec la réforme du 100 % santé , entrée en vigueur par étapes à partir de 2018, tous les Français peuvent désormais accéder à des prothèses dentaires, auditives ou des lunettes sans reste à charge. Sur l’audio et le dentaire, le recours au dispositif a dépassé les prévisions initiales , avec respectivement 40 % et 52 % en janvier-février 2021. Mais le marché de l’optique ne suit pas car l’offre sans reste à charge ne représente que 10 % des ventes en volume.
Pour libérer du temps médical alors que les médecins manquent, des postes d’assistants médicaux ont été subventionnés par l’Assurance-maladie. Le numerus clausus a été supprimé, en vue d’accroître le nombre de praticiens dans une dizaine d’années.
La loi Ma Santé 2022, votée mi-2019, visait à doubler le nombre de maisons de santé et de centres de santé pluriprofessionnels , avec respectivement 1.000 et 350 structures supplémentaires à l’horizon 2020. L’Institut Montaigne évoque des résultats « prometteurs » avec 1.740 maisons de santé en décembre, soit 700 de plus et un objectif rempli à 73 %. Cela reste un peu court sur les centres de santé, qui étaient 455, soit une centaine de créations. Mais le contexte de crise du Covid a compliqué les choses.
Parallèlement à la réorganisation des soins de ville, des « hôpitaux de proximité » ont été labellisés , pour clarifier la gradation des soins entre établissements et flécher des financements.
La feuille de route « santé mentale et psychiatrie » a été présentée en juin 2018, notamment afin de renforcer les projets territoriaux.
Mener la révolution de la prévention
En 2018, le nombre de vaccins obligatoires pour le nourrisson est passé de 3 à 11. Résultat, la couverture de la vaccination hexavalente est passée de 93,1 % à 98,6 %.
Le prix moyen du paquet de cigarettes devait augmenter de 3 euros en trois ans, à 10 euros en novembre 2020. C’est chose faite, avec au passage 1,6 million de fumeurs en moins en deux ans.
Le gouvernement a sélectionné un label de qualité nutritionnelle des aliments , le Nutri-Score, que plus de 100 entreprises apposent sur leurs emballages sur une base volontaire.
Suite à une promesse gouvernementale, 63 % d’élèves ont déjà été formés ou sensibilisés aux premiers gestes de secours.
Déployer la santé numérique
Malgré la crise, les engagements de la feuille de route de 2019 sur le numérique en santé « ont été tenus », estime l’Institut Montaigne, avec notamment la création de référentiels qui seront opposables pour les logiciels médicaux et l’entrée des régions à la gouvernance de l’Agence du numérique en santé.
L’épidémie de Covid a même servi d’accélérateur à la numérisation. La téléconsultation a décollé après avoir été libéralisée dès mars 2020 pour que les patients puissent continuer à consulter leur médecin.
Les logiciels d’aide à la prescription, qui font appel à l’intelligence artificielle et viennent en renfort du médecin dans son cabinet, vont être évalués par la Haute Autorité de santé. Elle a lancé une consultation sur le référentiel de certification en août 2020.
Deux milliards d’euros sont consacrés au numérique dans le cadre des accords du « Ségur » de juillet 2020.
Soutenir l’innovation en santé
Le cadre des expérimentations de nouvelles organisations et modes de financement a été drastiquement simplifié grâce à l’article 51 de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2018. Depuis lors, 71 projets ont été retenus sur les 810 déposés et les 528 éligibles, avec à la clé 342 millions d’euros de dépenses engagés sur cinq ans.
Emmanuel Macron avait promis de réduire la part du financement au volume d’activité à 50 % des ressources des hôpitaux. En 2019, un forfait a donc été mis en place pour la prise en charge hospitalière du diabète et de l’insuffisance rénale chronique. L’enveloppe consacrée au financement à la qualité à l’hôpital a quintuplé, à 300 millions d’euros.
Alors que la France n’a pas réussi à mettre au point un vaccin contre le Covid l’an dernier, Emmanuel Macron a lancé en juin 2021 une stratégie Innovation santé 2030 . Dotée de plus de 7 milliards d’euros, elle va permettre d’investir dans la biothérapie et la bioproduction de thérapies innovantes, les maladies infectieuses émergentes et la santé numérique, avec la médecine dite des « 5P » (préventive, personnalisée, prédictive, participative et basée sur les preuves).
Soulager « la douleur de l’hôpital »
Après une succession de plans pour l’hôpital peu financés, le gouvernement Castex a mis sur la table 8,3 milliards d’euros par an pour revaloriser les soignants hospitaliers. Ce « Ségur de la santé » très « hospitalo-centré » a également prévu 19 milliards d’investissements et de reprise de dette pour les établissements, étalés sur plusieurs années. Dans la tourmente du Covid, la « douleur de l’hôpital » , que l’ex-Premier ministre Edouard Philippe avait promis de soulager en 2018, a enfin été entendue.