Services à la personne : Bercy renonce à restreindre l’avance immédiate de crédit d’impôt

Pour lutter contre la fraude, le gouvernement souhaitait resserrer le dispositif de crédit d'impôt instantané pour les services à la personne. Les entreprises du secteur l'ont convaincu d'y renoncer, pour ne pas enrayer le succès du dispositif.


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Machine arrière toute. Pour éviter les fraudes, Bercy voulait restreindre en 2024 l’avance immédiate de crédit d’impôt pour l’emploi à domicile. Mais les protestations conjointes des fédérations de particuliers employeurs et d’entreprises des services à la personne ont convaincu le gouvernement de reculer. Les mesures de resserrement ont donc disparu du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2024.

Concrètement, les particuliers pourront continuer à ne payer que 50 % des dépenses engagées pour du soutien scolaire ou du ménage par exemple – dans la limite de 12.000 euros de dépense par an (c’est-à-dire 6.000 euros effectivement payés). Depuis 2022, le solde est directement pris en charge par l’Etat, grâce au dispositif d’« avance immédiate ». Au lieu d’attendre un an pour être remboursé, ce « crédit d’impôt instantané » permet aux particuliers de ne pas avoir à avancer la trésorerie : ils ne paient plus que ce qui restera effectivement à leur charge.

Prestations fictives et usurpation d’identité

Malheureusement, ce dispositif novateur a été détourné par des escrocs, qui montaient des sociétés fantômes et facturaient des prestations fictives à des clients complices ou victimes d’usurpation d’identité. Ils touchaient ainsi l’« avance immédiate » de l’Etat, avant de disparaître dans la nature. L’an dernier, l’Urssaf a identifié plusieurs de ces structures. Le préjudice se chiffre en millions d’euros.

Pour refermer au plus vite cette brèche, le gouvernement avait prévu plusieurs garde-fous dans le PLFSS. D’une part, il voulait abaisser le plafond d’« avance immédiate » – potentiellement de moitié (soit 3.000 euros maximum) -, charge aux particuliers d’avancer les sommes dépassant ce seuil. D’autre part, il comptait obliger les prestataires à se faire directement rémunérer par l’Urssaf, en cas de recours à l’« avance immédiate », pour mieux contrôler les flux.

Un fonds de garantie

Ces pistes à peine connues, les particuliers employeurs comme les sociétés prestataires sont montés au créneau. « Ce n’était pas acceptable. Je dois garder une relation financière avec mes 300.000 clients », explique Maxime Aiach, le patron fondateur du groupe Domia, un poids lourd du secteur avec les enseignes Acadomia et Shiva.

Les prestataires de services à domicile ont proposé une alternative à Bercy : durcir l’habilitation pour bénéficier du dispositif, en requérant deux ans d’ancienneté et des cotisations fiscales et sociales à jour, et mettre en place un fonds de garantie, où chaque entreprise versera une caution (dont le montant reste à définir, mais qui serait au minimum de 50.000 euros) avant de toucher le moindre acompte. L’Urssaf n’y était pas favorable, mais le gouvernement a accepté.

Tremplin du plein-emploi

Pour l’exécutif, il s’agit de ne pas gripper un dispositif qui rencontre un grand succès. Près de 1 million de Français ont déjà bénéficié de l’« avance immédiate » – dont les deux tiers via l’une des 8.400 entreprises habilitées. La montée en puissance du dispositif est frappante : après 370 millions d’euros d’avance immédiate versés en 2022, l’Urssaf a prévu d’en débourser 850 millions cette année.

Ce vendredi, à l’occasion d’une table ronde organisée par le sénateur Michel Canevet, les responsables des administrations impliquées (DGE, DGFiP, Sécurité sociale, Urssaf) et plusieurs professionnels des services à la personne, on fait le constat unanime de ce succès.

Pour le secteur, c’est un puissant moteur de croissance. Une étude récente du cabinet Oliver Wyman estime que, sur la période 2022-2026, l’« avance immédiate » permettra de créer 360.000 emplois et de réduire d’autant le travail au noir, qui passerait de 43 % à 33 % du marché des services à la personne. Le gouvernement, tout à son objectif de plein-emploi , y est certainement sensible.


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