Taxe d’habitation : un arbitrage délicat à la rentrée

Le député et rapporteur du Budget, Laurent Saint-Martin, estime que, parmi les 20 % des Français les plus aisés, certains « ne roulent pas sur l’or ». Et qu’ils doivent bénéficier de la suppression de l’impôt local dès 2021. Le Premier ministre devrait trancher à la rentrée.


« C’est une mesure attendue par 20 % des Français dès 2021. Et, parmi eux, tous ne roulent pas sur l’or », lance Laurent Saint-Martin, le rapporteur du Budget et député LREM. Comme les autres parlementaires, l’élu de la majorité a appris en écoutant l’interview d’Emmanuel Macron, ce 14 juillet, que le nouveau gouvernement envisageait de reporter la suppression de la taxe d’habitation pour les 20 % de Français les plus aisés. Déjà votée et prévue à partir de 2021 – avec une suppression par tiers jusqu’en 2023 -, la réforme pourrait être décalée d’un an ou deux.

« Protéger les classes moyennes »

Mais si « rien n’est encore tranché », assure-t-on à Bercy, reporter cette réforme fiscale est évidemment un dossier ultrasensible. Car parmi les 20 % de contribuables concernés, tous ne sont pas des grandes fortunes. « Il y a beaucoup de classes moyennes et nous voulons protéger les classes moyennes, nous le faisons en refusant toute augmentation d’impôts », a ainsi tenu à rassurer Bruno Le Maire, le ministre de l’Economie, en montant au créneau plusieurs fois dans les médias depuis l’interview présidentielle.

A Bercy, on martèle ainsi qu’il est urgent… de prendre son temps ! Pas question de trancher cet été. « L’arbitrage sera fait par le Premier ministre, au moment du Projet de loi de Finances cet automne », assure-t-on. D’ici là, Bruno Le Maire doit aller consulter les parlementaires pour tâter le terrain, avant de faire ses propositions à Jean Castex.

« C’est une décision votée par le Parlement, il n’est donc pas question de revenir dessus et d’annuler cette suppression », lance Laurent Saint-Martin, en écho aux propos du patron de Bercy. Elle aura donc lieu. Mais quand ? Et pour qui ? Alors que 80 % des ménages ne la paient plus à partir de cette année, plusieurs options sont sur la table concernant 20 % des foyers les plus aisés.

Plusieurs options sur la table

« Il y a tout d’abord la possibilité de reporter la réforme d’un an ou deux, précise le parlementaire. Mais personnellement, je suis plutôt favorable à ce que la suppression démarre malgré tout en 2021 même si l’on peut imaginer un amortissement plus long, par exemple échelonné sur quatre ans au lieu de trois. Car de nombreux contribuables comptent dessus. En tant que rapporteur du Budget, je serai vigilant à ce qu’il y ait une baisse de la taxe d’habitation pour ces classes moyennes dès 2021. »

Une autre option, présentée succinctement par Bruno Le Maire est également regardée de près par les parlementaires. « Ce décalage pourrait être porté par les 5 % de Français les plus riches, poursuit Laurent Saint-Martin. Ce n’est pas idiot car cela exclut les classes moyennes et, dans le contexte de crise, ce serait une question de justice fiscale. »

Faire contribuer les plus fortunés à la relance

Mais combien cela ferait-il économiser à l’Etat ? Si le report est acté pour les 20 % de contribuables les plus riches, le gain sera de 7 milliards d’euros. Bien moins si la réforme est décalée uniquement pour les 5 % des plus aisés. « Quoi qu’il arrive, ce n’est pas avec cette décision, quel que soit le schéma choisi à la fin, que l’Etat financera le plan de relance, lance le rapporteur du Budget. Aujourd’hui, si l’on a besoin de 2 milliards, on ne passe pas par l’impôt mais par l’emprunt. Cette décision, c’est avant tout une manière de faire participer les plus fortunés à l’effort de relance. »


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