Réforme des retraites: pourquoi le sujet des carrières longues est explosif

Le dispositif des carrières longues est un des points de friction de la réforme des retraites qui doit être présentée le 10 janvier. Elles devraient être maintenues mais remodelées


Qu’est-ce qu’une carrière longue ?

Comme à chaque réforme des retraites où il est question de reporter l’âge de départ – en l’occurrence de 62 à 65 ans – l’un des enjeux des négociations porte sur les mécanismes dérogatoires à trouver pour ne pas pénaliser les Français qui ont commencé à travailler plus tôt que les autres.

L’un de ces mécanismes s’appelle les carrières longues. Concrètement, bénéficier d’une carrière longue permet de partir avant 60 ans ou avant 62 ans si on a commencé à travailler avant 16 ans ou avant 20 ans. C’est un dispositif qui a été pensé pour récompenser les travailleurs méritants, les ouvriers qui sont rentrés très tôt sur le marché de l’emploi et les employés modestes.

Aujourd’hui, il concerne un retraité sur quatre. Et le passage de l’âge légal de 62 à 65 ans est donc crucial pour ces Français qui se demandent si, eux aussi, par effet domino, devront travailler trois ans de plus.

Que veut faire le gouvernement ?

En toute logique, il n’est pas possible de maintenir un mécanisme qui permet à certains Français de partir à 58 ans quand d’autres devront attendre 65 ans pour partir à la retraite avec un taux plein. Le fossé entre les deux âges est trop grand. Mais le gouvernement reste très prudent sur le sujet des carrières longues qui est cher à la CFDT.

Emmanuel Macron l’a dit : travailler à 65 ans pour obtenir la retraite n’est pas la même chose pour tout le monde. C’est la raison pour laquelle la Première ministre, Elisabeth Borne, a dit qu’elle allait maintenir le dispositif des carrières longues donc conserver le principe de départ anticipé de deux ou quatre ans avant l’âge de départ légal.

Mais elle veut également l’assouplir. Qu’est-ce que cela veut dire ? Pour l’instant, on ne sait pas grand chose du petit lifting qui est prévu par l’exécutif sur ce sujet.

Sur quoi les négociations coincent-elles ?

En réalité ça coince sur le maintien même d’un dispositif que certains jugent coûteux et même obsolète. En 2019, c’est 128 000 salariés du privé, travaillant pour l’essentiel dans l’amiante qui en ont bénéficié. Et on estime qu’à partir de 2035, ils ne seront que 40 000 par an à y prétendre.

Dans ce contexte, à quoi bon conserver un dispositif qui concerne si peu de monde et qui fragilise la borne d’âge des 65 ans ? Faut-il l’amender ? Faut-il complètement le supprimer ? C’est la question qui divise les syndicats, le gouvernement et le patronat.

C’est un sujet explosif car les carrières longues sont liées à un autre sujet délicat, celui de la pénibilité. Et le Conseil d’orientation des retraites (COR) l’a rappelé il y a peu : l’espérance de vie augmente avec le niveau de vie et un cadre de 62 ans vit 6,5 ans de plus qu’un ouvrier du même âge.

C’est l’un des arguments les plus forts qu’ont les syndicats dans leur besace pour finalement casser l’idée même d’un âge de départ à la retraite similaire pour tous.


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