L’augmentation des petites pensions promise par le gouvernement promet d’être compliquée à mettre en oeuvre. A tel point qu’elle ne devrait pas être complètement effective pour les retraités actuels avant le mois de septembre… 2024.
Pour mémoire, la réforme des retraites doit porter le minimum de pension pour les personnes ayant suffisamment cotisé (carrière complète) à 85 % du SMIC, soit autour de 1.200 euros brut. L’exécutif avait initialement envisagé ce coup de pouce pour les seuls futurs retraités, amenés avec la réforme à travailler plus longtemps. Soucieux de s’allier les députés LR, indispensables à l’adoption de sa réforme sans recourir à l’article 49.3 de la Constitution, il a cependant décidé d’étendre la mesure, au bénéfice de quelque 1,8 million de retraités actuels.
Augmentation au prorata du temps travaillé
Concrètement, les retraités actuels pourraient voir leur pension revalorisée, jusqu’à 100 euros par mois. Sachant que cette augmentation sera calculée au prorata du nombre de trimestres cotisés. Sur le papier, l’opération peut sembler simple. Dans la réalité, ce sera un casse-tête technique puisqu’il faudra reconstituer les carrières des retraités.
« On a énormément de données qui sont totalement indisponibles », a ainsi alerté Renaud Villard, le directeur de la Caisse nationale d’assurance-vieillesse (CNAV), la semaine dernière lors d’une audition au Sénat, expliquant qu’avant 2007 la notion de trimestre cotisé nécessaire pour le calcul du minimum de pension n’existait pas.
Et de rappeler que parmi les retraités actuels, nombre d’entre eux ont commencé à travailler dans les années 1950. « Autant vous dire que reconstituer leurs carrières cotisées avec des déclarations employeurs qui tenaient sur une feuille de papier […] cela va être un petit travail », a-t-il poursuivi ironiquement.
Au plus tard en septembre 2024
Le gouvernement sait que la tâche ne sera pas facile. Les « systèmes d’information [des caisses de retraite] seront adaptés pour prendre en compte la connaissance variable des carrières passées », note un document joint au projet de réforme. Résultat : si les premiers versements devraient intervenir « dès septembre 2023 », les retraités actuels devront attendre « au plus tard en septembre 2024 » pour toucher l’intégralité des montants promis.
Pour les nouveaux retraités, la revalorisation des petites pensions, « ne présente pas de difficulté spécifique », note le même document (sauf pour tenir compte dans leur calcul des périodes de congés parentaux). Ce qui pourrait s’avérer difficile, en revanche, c’est de défendre l’impact de la mesure qui doit bénéficier à 54.000 nouveaux retraités en 2023 et autour de 200.000 personnes par an dans les années suivantes.
« Aujourd’hui, vous avez 5 millions de retraités qui sont sous les 1.200 euros […] Vous aurez toujours au terme de la réforme 4,2 millions, 4,3 millions qui seront sous les 1.200 euros », a critiqué l’économiste Michaël Zemmour sur France Inter mardi.
Hausse moyenne de 680 euros par an
Car les 85 % du SMIC net renvoient à la pension minimum que pourrait toucher un retraité ayant une carrière complète, à temps plein et au SMIC (un cas type). Par ailleurs, ils incluent la retraite complémentaire sur laquelle le gouvernement n’a pas prise.
Pour les retraités futurs, le gouvernement compte agir, d’une part en augmentant le minimum contributif (mico) de base, d’autre part en relevant sa « majoration », celle-ci bénéficiant à ceux qui ont cotisé au moins trente ans. Au mieux, le coup de pouce serait de 100 euros par mois (25 euros pour le mico de base et 75 euros pour le mico majoré). Pour le «stock» des retraités, la revalorisation s’appliquera à ceux qui ont cotisé au moins 30 ans (120 trimestres).
En tous les cas, une personne qui n’a pas cotisé suffisamment de temps ne touchera pas 100 euros, mais un montant au prorata du temps travaillé. Dans son étude d’impact, le gouvernement note que, pour les nouveaux retraités, la hausse de la pension moyenne serait de 400 euros par an, soit 33 euros de plus par mois. Pour le «stock» des retraités, la hausse de la pension annuelle serait en moyenne de 680 euros, soit environ 57 euros de plus par mois.