C’est un éternel recommencement. Après celle du 1er janvier, la hausse du SMIC qui va intervenir le 1er mai du fait de l’inflation va de nouveau bousculer les grilles salariales des branches professionnelles. Et pas qu’un peu. La revalorisation, qui atteindra 2,65 %, va provoquer un écrasement des premiers niveaux hiérarchiques dans toutes les branches dont les minima conventionnels démarrent en dessous du nouveau taux horaire du salaire minimum, fixé à 10,85 euros à compter de dimanche.
Si l’équipe gouvernementale sortante a pris soin d’intégrer la hausse du SMIC à sa grille salariale, la fonction publique ne sera pas épargnée, avec 8 échelons de catégorie C et même 2 de B dépassés. Dans le privé, 146 branches de 5.000 salariés ou plus, soit 85 % d’entre elles, seront concernées, a calculé le ministère du travail. A la mi-avril, à la suite de la précédente revalorisation de 0,9 % intervenue le 1er janvier, 62 étaient sous le SMIC et 109 au-dessus.
Propreté, coiffure…
Les branches employant le plus de salariés peu qualifiés vont être concernées au premier chef. Avec des situations contrastées alors que, sous la pression du gouvernement, celles des métiers « essentiels » ont été pressées de négocier . Les hôtels, cafés et restaurants étaient jusque-là systématiquement impactés du fait de la faiblesse de leurs minima. La branche ne sera cette fois-ci pas concernée. Le barème revalorisé dans l’accord signé le 18 janvier qui prévoit une augmentation moyenne de 16,33 % démarre à 4,1 % au-dessus de la valeur du SMIC au 1er janvier.
La propreté devrait être rattrapée. La coiffure, elle, en panne de négociation, va voir sa grille encore un peu plus s’écraser. Des branches d’autres secteurs aussi vont passer sous le SMIC, notamment la chimie ou les banques. Celle de Syntec aussi, malgré le nouvel accord conclu avec la CFDT et la CFTC le 31 mars prévoyant une revalorisation de 3,1 %. A respectivement 10,6 et 2,60 euros mensuels près, les deux premiers échelons de sa grille ETAM sont sous le SMIC. Cette hausse se situe dans l’étiage de beaucoup de branches, parmi les 23 qui ont négocié un accord salarial au début de 2022, le taux minimum constaté étant 2,2 % et le taux maximum, hors hôtels cafés restaurants, étant de 6 %, dans le transport routier de marchandises.
Clause de revoyure
Face au retour de l’inflation, des branches ont commencé à prendre la précaution de prévoir une clause de revoyure. C’est le cas de l’accord salarial qui vient d’être signé dans le commerce à prédominance alimentaire. « Compte tenu des augmentations à échéance très rapprochée du SMIC, le choix des partenaires sociaux a été de négocier en continu de manière à cranter les évolutions de salaires et à ne pas retarder l’entrée en vigueur de ces évolutions tout en rouvrant les négociations dès que nécessaire », explique Jacques Creyssel, délégué général de la Fédération du Commerce et de la Distribution. De nouvelles négociations doivent s’ouvrir courant mai.
La multiplication des hausses du SMIC – trois en six mois – bouscule la mécanique bien rodée des branches fondée sur un rendez-vous salarial au mieux annuel, certaines seulement sous la pression des pouvoirs publics. En octobre 2021, cela faisait neuf ans qu’il n’y avait pas eu de hausse du salaire minimum hors rendez-vous légal. Et cela était vu comme une exception.
C’est l’un des éléments qui avait d’ailleurs justifié de ramener cette augmentation légale du 1er juillet au 1er janvier : mieux caler les calendriers annuels des secteurs et du SMIC pour éviter de devoir courir après ce dernier en fin d’année.