Un tiers qui a conclu un accord en un temps record, une grosse moitié dans la dernière ligne droite, et trois moutons noirs : c’est en résumé le bilan que le ministère du Travail tire du suivi des négociations dans une quarantaine de branches de plus de 5.000 salariés dont les grilles de rémunérations étaient pour partie inférieures au SMIC depuis le début de l’année.
Ce suivi ainsi que les mesures de revalorisation des conditions de travail des salariés dits de la deuxième ligne participent « d’un enjeu d’attractivité de ces métiers dans un contexte de tensions de recrutements importantes », a commenté Elisabeth Borne ce vendredi matin, dans la foulée d’un point de situation avec les partenaires sociaux.
Marquer à la culotte
Cette quarantaine de branches avait été identifiée à la rentrée parce que leurs minima conventionnels étaient inférieurs au SMIC, soit depuis longue date, soit au lendemain de l’augmentation du salaire minimum du 1er janvier dernier . Compte tenu de la pression sur les questions de pouvoir d’achat, le ministère a décidé de les marquer à la culotte pour qu’elles remédient rapidement à la situation.
Une dizaine a conclu un accord revalorisant les grilles de rémunérations, parmi lesquelles celles du bricolage, de l’esthétique et des salariés permanents de l’intérim, pour citer les trois employant le plus de salariés. Dans l’hôtellerie, les cafés et la restauration, les organisations patronales ont mis sur la table jeudi soir un projet d’accord prévoyant une hausse moyenne de la grille de 16,33 %, fraîchement accueilli par les syndicats du secteur.
Dans l’entourage d’Elisabeth Borne, on souligne deux points positifs à la démarche. Primo, toutes ces négociations ont été bouclées en moins de trois mois. Une partie de la vingtaine de branches qui n’ont pas encore abouti – le commerce de gros par exemple – pourrait avoir bouclé en janvier, aux termes, là encore, d’un délai notablement court. Secundo, le travail a très souvent abouti à un rattrapage de l’ensemble des grilles, pas uniquement des premiers niveaux de qualification.
Borne met la coiffure à l’index
La situation est en revanche difficile voire bloquée dans trois branches où le « dialogue social apparaît clairement défaillant », a regretté Elisabeth Borne. Il s’agit du bois négoce, des grands magasins et de la coiffure. « C’est d’autant plus incompréhensible pour cette dernière branche que les 106.000 emplois concernés ne souffrent d’aucune concurrence internationale », a jugé la ministre du Travail qui n’entend pas lâcher la pression.
Cette remise à l’heure des pendules ne signe pas la fin de l’histoire. Sur un total de 171 branches particulièrement suivies par la DGT parce qu’elles négocient peu ou mal, 108 (employant 6,6 millions de salariés en tout) comportent au moins un coefficient non conforme à la suite de la revalorisation exceptionnelle de 35 euros du SMIC intervenue le 1er octobre .
Le rattrapage devra être d’autant plus conséquent qu’une autre hausse du salaire minimum, de 14 euros celle-là, interviendra le 1er janvier prochain . Avec pour conséquence possible un tassement des grilles. Autrement dit, les salariés ressortant des premiers niveaux restent scotchés au salaire minimum même avec de l’ancienneté.
Appel à la mobilisation le 27 janvier
Pour éviter de sans cesse devoir remettre le métier sur l’ouvrage, la CGT a proposé que les grilles soient automatiquement remises à jour à chaque revalorisation du SMIC. Au-delà du non-respect du droit, cette option remettrait en cause la place des partenaires sociaux dans les négociations conventionnelles, a rétorqué le ministère.
S’il n’est pas question de sanction pour les branches qui traînent la patte, il n’est non plus question de mesures d’incitations, telle cette baisse de TVA que réclame la coiffure.
Estimant que le compte n’y est toujours pas, une intersyndicale réunissant la CGT, FO, la FSU, Solidaires et les organisations de jeunesse Fidl, MNL, Unef et UNL, a appelé vendredi à une mobilisation interprofessionnelle « sur les salaires et l’emploi » le 27 janvier. « Trop souvent encore les négociations sont au point mort ou les propositions des employeurs loin du compte », déplorent-elles.