Tout va très vite. Les hypothèses de programme des vols présentées en interne à Air France la semaine dernière ne tiennent déjà plus. Alors que la quasi-totalité de la flotte d’Air France et de KLM est clouée au sol, il était encore question d’assurer une offre très ambitieuse en juillet et en août : remettre en ligne 70 à 80% de l’offre en sièges long-courriers initialement prévue cet été avant la crise du Covid, 80 à 90% sur le moyen-courrier et 65 à 75% sur le court-courrier. Sans surprise, ces hypothèses ne tiennent plus. Le directeur général d’Air France-KLM,
Ben Smith, l’a indiqué ce vendredi à des pilotes lors d’une visioconférence. Après une activité minimale en juin où seulement 20% de la capacité globale pourraient être assurés, Ben Smith compte remettre en service en juillet 40% de l’offre (en sièges kilomètres offerts) initialement prévue avant la crise, puis 60% en août, avant d’atteindre 75% au quatrième trimestre au mieux. Ce qui semble encore terriblement ambitieux, au moins pour cet été. Comme beaucoup, le directeur général d’Air France-KLM prévoit une reprise lente et progressive. Pour Ben Smith, il faudra deux ans pour revenir au même niveau que 2019.
Perte de 25 millions d’euros par jour
La situation est critique. Air France-KLM perd 25 millions d’euros par jour et Air France n’a aujourd’hui des liquidités que pour tenir jusqu’à début juin. Cela semble un peu exagéré. Selon nos informations, Air France perd entre 500 et 600 millions d’euros par mois (hors prise en charge par l’Etat du chômage partiel). C’est ce qui a été présenté récemment aux représentants du personnel. Le tout pour une trésorerie de 1,5 milliard d’euros (KLM a le même niveau et Air France-KLM dispose d’environ 2,5 milliards).
Deux demandes à l’Etat
Le groupe a besoin une aide extérieure pour se renflouer. “En l’absence de financements complémentaires, un besoin de liquidité est attendu au troisième trimestre 2020”, a prévenu Air France-KLM jeudi dans son communiqué, précisant qu’il s’agissait là de ses “meilleures estimations”.
“En conséquence, le groupe Air France-KLM, Air France et KLM, mènent des discussions approfondies avec leurs gouvernements respectifs et des institutions financières afin de disposer des ressources qui leur permettront de sécuriser et soutenir les niveaux de liquidités adéquats, par tous les moyens”, avait précisé le le groupe.
Des négociations sont en cours avec les Etats français et néerlandais pour obtenir des prêts garantis. Il y a deux demandes à l’Etat français. L’une vise à obtenir des liquidités pour passer la crise à court terme (4 à 5 mois), l’autre est destinée à couvrir les 12 à 18 prochains mois.
Les banques sont réticentes
Problème. Les banques sont réticentes à prêter avec une garantie de l’Etat sur 75% des prêts. Selon les pilotes, Ben Smith chercherait à obtenir un niveau de cash non plafonné garanti à 90% par l’Etat. Le dirigeant canadien serait hostile à une nationalisation d’Air France qui ne serait pas une réponse aux besoins de cash du groupe à court terme, a-t-il dit aux pilotes.
Le faible niveau de capacités prévu d’ici à la fin de l’année va provoquer du sureffectif et un nombre trop important d’appareils. Mais si l’Etat garantit les prêts à Air France, il pourrait exiger au groupe de ne pas licencier. Pour l’heure, la direction ne prévoit pas de licenciements. Le quart de la flotte pourrait néanmoins être supprimé d’ici à la fin de l’année.
Si les deux prochains A350 seront livrés en mai et juin, aucune décision n’a été prise pour le dernier B787 et les deux A350 prévus pour être livrés au quatrième trimestre. Pour l’heure, les prises de livraison des premiers A220 à l’automne 2021 restent inchangées. Ben Smith a bien l’intention d’anticiper la sortie de flotte des A380.