Assurance : “On sort de cette crise […] avec une image déplorable”

Image dégradée aux yeux du grand public et rivalités commerciales entre acteurs du secteur : le Covid-19 a agi comme le virus de la discorde au sein de l'assurance française.


“On sort de cette crise […] avec une image déplorable” alors qu’“on a donné pour le pays” et qu’“on a été touchés par des sinistres considérables”, peste auprès de l’AFP un dirigeant français d’assurance.

Ce témoignage illustre le vague à l’âme et les dissensions qui secouent le secteur, victime collatérale du Covid-19.

Dernier soubresaut en date, le réassureur Scor a quitté la Fédération française de l’assurance (FFA), née en 2016 pour faire parler d’une même voix ses différentes familles : assureurs “classiques”, bancassureurs, mutualistes et réassureurs.

La décision de Scor, membre historique et influent de la FFA, est directement liée à la participation − forcée selon lui − des membres de la fédération au fonds de solidarité mis en œuvre par le gouvernement pour soutenir les petites entreprises face à la crise.

Les assureurs ont en effet contribué deux fois à ce dispositif, en versant 200 millions d’euros mi-mars puis autant mi-avril sous la pression des pouvoirs publics.

Ils revendiquent au total presque quatre milliards d’euros de soutien à l’économie: outre les 400 millions d’euros versés au fonds public d’aide, le secteur a annoncé 1,5 milliard d’euros d’investissement ainsi que de multiples mesures individuelles.

Image dégradée

Certains observateurs estiment toutefois que ces mesures ont trop tardé et les critiques se sont multipliées.

Le débat s’est rapidement cristallisé autour des pertes d’exploitation des entreprises. Or, dès les premiers jours de la crise, le secteur a expliqué ne pas être en mesure de couvrir ces pertes, estimées à plusieurs dizaines de milliards d’euros, opposant ainsi une fin de non-recevoir aux demandes d’indemnisation de l’hôtellerie-restauration en plein marasme.

De fait, l’immense majorité des contrats ne couvraient pas les pertes en cas de pandémie. Mais une petite partie d’entre eux étaient flous.

Les recours d’entreprises devant la justice se sont multipliés contre les assureurs tels qu’Axa dans le sillage de la victoire médiatisée fin mai du restaurateur Stéphane Manigold, qui a finalement annoncé avoir trouvé un accord financier avec le géant de l’assurance.

Au final, “les pouvoirs publics et un certain nombre de parlementaires ont été choqués par l’attitude des assureurs, qui ont donné l’impression d’agir de manière contrainte et forcée”, analyse pour l’AFP un très bon connaisseur du secteur.

Les assureurs “ont commencé par se taire, pour ensuite dire que si on remboursait les pertes, l’assurance serait ruinée. Expliquer ça à des gens déjà ruinés, ça ne porte pas. En terme d’image, c’est désastreux”, poursuit cette même source.

“Clairement nos explications au début auraient dû être moins techniques et plus claires”, a reconnu Jean-Laurent Granier, patron de Generali France, dans un entretien à l’AFP.

Rivalités commerciales

Pour ne rien arranger, la crise a aussi été le théâtre d’empoignades entre assureurs.

Certains ont “profité de cette crise un peu maladroitement pour faire de la publicité commerciale”, s’est encore agacé vendredi sur B Smart Patrick Evrard, président de la Fédération nationale des agents généraux d’assurance, citant nommément le bancassureur Crédit Mutuel et la Maif.

Invoquant son “devoir moral”, le premier a annoncé verser 200 millions d’euros de primes à ses clients professionnels, non sans avoir affirmé que ses contrats ne couvraient pas les pertes d’exploitation en cas de pandémie. Ce qu’ont toutefois contesté plusieurs concurrents, qui l’ont accusé dans un courrier de “campagne de communication trompeuse” en vue de “minorer les indemnités réellement et contractuellement dues aux assurés”.

La Maif a elle rendu plus de 100 millions d’euros à ses sociétaires pour tenir compte de l’effondrement des accidents automobiles durant le confinement, faisant grincer des dents plusieurs concurrents.

Ces initiatives “créent l’idée que tous les assureurs pouvaient payer, c’est malhonnête”, enrage l’un d’eux auprès de l’AFP.

Ces tensions s’ajoutent à la vive concurrence dans le secteur, notamment entre assureurs et groupes de bancassurance, lesquels gagnent chaque année des parts de marché, en assurance habitation et automobile notamment, et dominent le lucratif segment de l’assurance emprunteur.

“Derrière tout ça, il y a surtout des rivalités commerciales”, résume un bon connaisseur de l’assurance.

Au sortir de la crise sanitaire, “il va y avoir des traces. Il reste des points de frictions assez importants entre bancassureurs et assureurs traditionnels. Je ne sais pas comment ça peut évoluer dans le temps”, s’inquiète un dirigeant du secteur.


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