La rédaction du Programme de stabilité qui sera envoyé à la mi-août à la Commission européenne a rarement été aussi délicate. Le document dévoilé ce jeudi, qui dessine le chemin budgétaire du nouveau quinquennat d’Emmanuel Macron, a été réalisé dans un « contexte économique incertain, marqué par des risques baissiers », a insisté le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire.
Fermeture du marché chinois, coupure probable du gaz russe, ralentissement américain et, désormais, instabilité en Italie suite au départ du président du Conseil Mario Draghi : les facteurs susceptibles de dégrader encore le scénario macroéconomique ne manquent pas.
Plein-emploi
C’est en tenant compte de tous ces aléas que Bercy anticipe un ralentissement de la croissance à 1,4 % l’an prochain contre 2,5 % cette année, avant une remontée progressive à 1,8 % en 2027.
Ce retour à 1,8 % sera possible « grâce aux réformes économiques portées par notre majorité », a assuré le ministre de l’Economie, citant la réforme des retraites, la baisse des impôts de production, les réformes de l’éducation et de la formation professionnelle ou encore la poursuite de la transformation de l’assurance-chômage et le déploiement du plan d’investissement « France 2030 » .
Bruno Le Maire a aussi promis que les mesures de son gouvernement en faveur de « la valorisation du travail » permettraient d’atteindre le plein-emploi en 2027. Un taux de chômage de 5 % en fin de quinquennat est inscrit noir sur blanc dans le document pour Bruxelles. « Cela n’a jamais été fait en plus d’un demi-siècle », rappelle le ministre.
Objectif ambitieux
Surtout, dans la droite ligne des engagements pris l’an dernier , Bercy promet de maîtriser la dépense publique. L’augmentation globale sera contenue à 0,6 % hors inflation par an en moyenne, d’ici à 2027, soit le « niveau le plus faible jamais connu depuis vingt ans », martèle Bercy.
Un objectif très ambitieux, même s’il n’intègre pas les mesures de crise et de relance. Sont en revanche comprises les dépenses liées au paquet « pouvoir d’achat » (bouclier énergétique, revalorisation des pensions et minima sociaux, ristourne sur le carburant…), en train d’être voté au Parlement.
Pour mémoire, les prévisions envoyées à Bruxelles en 2021 affichaient une hausse des dépenses publiques limitées à +0,7 % par an, ce qui avait déjà fait sourciller.
Postes d’économies
Les efforts porteront surtout sur l’Etat et les collectivités locales. Le premier devra réduire ses dépenses de 0,4 % par an en moyenne. A ce stade, les postes d’économies ne sont pas connus. Ils seront détaillés à la rentrée.
Les collectivités verront, quant à elles, leurs dépenses de fonctionnement réduites de 0,5 % par an, mais Bercy insiste sur le fait qu’elles bénéficient de la très bonne tenue des recettes fiscales et des mécanismes d’indexation sur l’inflation. Le ministère reste d’ailleurs sourd aux demandes de certains députés de faire en sorte que l’Etat compense la revalorisation du point d’indice des fonctionnaires et celle du RSA. Les collectivités qui ont des difficultés pourront être soutenues au cas par cas.
Le ministre de l’Economie l’a affirmé, même si « les dépenses doivent progresser moins vite que la croissance », la trajectoire fixée dans le document pour Bruxelles n’est pas synonyme d’austérité. A côté du régime imposé à l’Etat et aux collectivités, les dépenses sociales vont augmenter « pour répondre aux engagements du Ségur, du plan hôpital, du plan urgence ».
Geste sur les successions
Au final, et comme Bercy l’a déjà indiqué , le déficit budgétaire passerait sous la barre de 3 % du PIB en 2027 « quoi qu’il arrive ». L’endettement commencerait à refluer à compter de 2025 : la dette s’élèverait à 112,5 % du PIB à la fin du quinquennat, contre 111,9 % cette année, mais après un pic à 113,3 % dans trois ans.
Sur les baisses d’impôts, l’autre « marqueur » de la politique du gouvernement mis en avant par le ministre, les cinq prochaines années seront moins fastes. La baisse des impôts de production , en une fois, l’an prochain, pour 8 milliards d’euros, constitue la plus grosse partie. Concernant le geste sur les successions et donations promis par Emmanuel Macron pendant la campagne, Bercy indique qu’il « pourra l’engager à partir de 2023 mais tout ne sera pas fait en 2023 ».