Le bras de fer continue. Alors que les finances des collectivités locales font partie des dossiers politiques les plus sensibles de l’examen du projet de loi de finances pour 2023, le gouvernement a profité du 49.3 pour réintroduire une disposition torpillée par les oppositions et imposant un contrôle des dépenses à ces collectivités. De quoi tendre un peu plus la suite du débat, notamment avec LR.
A l’origine, Bercy avait institué dans sa loi de programmation des finances publiques (LPFP) pour les années 2023 à 2027 un objectif limitant la progression des dépenses réelles de fonctionnement des collectivités locales à un rythme « inférieur de 0,5 point au taux de l’inflation ». Pour s’assurer que cet objectif serait bien atteint, la LPFP voulait instituer un mécanisme de « pacte de confiance ».
Les oppositions vent debout
Comme la confiance n’exclut pas le contrôle, ce dispositif prévoyait un rapport annuel pour s’assurer du respect de cette trajectoire financière, et un mécanisme contraignant obligeant à une correction le cas échéant s’appliquant aux seules 500 plus grosses collectivités. « Il s’agit d’un compromis pour nous, puisque nous acceptons de ne pas réintroduire le cadre des contrats financiers dits ‘de Cahors’ qui avaient suscité la critique », souligne une source gouvernementale.
Lors du débat parlementaire autour de la loi de programmation, LR et toutes les oppositions s ‘étaient liguées pour rejeter ce dispositif . Mais le gouvernement est revenu discrètement par la fenêtre : le volet dépenses du projet de loi de finances (PLF) pour 2023 adopté ce mercredi par l’article 49.3 de la Constitution a en effet réintroduit ce fameux « pacte de confiance » tant décrié par les oppositions. « Rien ne se fait en catimini, ce dispositif était connu et a été débattu à l’Assemblée nationale. Mais comme la LPFP a été rejetée par l’Assemblée, ses principaux articles ont dû être réintroduits dans le PLF par amendement », se justifie-t-on à Bercy.
Tensions avec LR
Cette initiative a suscité un tir de barrages de certaines associations d’élus locaux. L’Association des maires de France (AMF) a fustigé jeudi un « passage en force » du gouvernement et « une atteinte à la libre administration des collectivités locales ». L’association « Villes de France » s’est redit « fortement opposée à ce nouvel instrument, qui encadre unilatéralement l’évolution des dépenses réelles de fonctionnement ».
Plus embêtant pour le gouvernement, le retour de ce mécanisme controversé risque de compliquer les discussions avec LR autour d’un compromis possible pour l’adoption de la LPFP. Si les élus de droite semblent d’accord sur l’objectif limitant les dépenses des collectivités locales à 0,5 %, ils ne veulent pas entendre parler du « pacte de confiance » et son caractère contraignant. « C’est une ligne rouge. L’attitude du gouvernement est à ce stade incompréhensible », réagit Jean-François Husson (LR), rapporteur général du Budget au Sénat.
Pour autant, le gouvernement garde toujours l’espoir d’aboutir à une alliance sur ce texte avec LR. « L’important est d’avoir un mécanisme qui permet de s’assurer d’une maîtrise des dépenses des collectivités, et nos échanges continus avec les parlementaires en ce moment permettront aussi de définir la meilleure option », assure-t-on à Bercy, alors que l’amendement adopté précise que le dispositif est « provisoire ».
Le ministre délégué aux Comptes publics, Gabriel Attal, s’est par ailleurs dit prêt à prévoir des économies supplémentaires de l’Etat pour convaincre LR.