Et de trois ! Après avoir déclenché le 49.3 pour faire passer les parties recettes du budget de l’Etat et de celui de la Sécurité sociale la semaine dernière, Elisabeth Borne a de nouveau engagé, mercredi soir, la responsabilité de son gouvernement sur l’ensemble du projet de budget 2023 de la Sécurité sociale, via cet article de la Constitution.
La manoeuvre a été opérée après une séance de débats hachée et houleuse à l’Assemblée, en l’absence volontaire des députés Nupes et RN. « Je trouve regrettable que les bancs de la Nupes se soient vidés par anticipation alors que je cite des mesures souhaitées, voulues, réclamées, parfois depuis longtemps, par la gauche de cette Assemblée », a déclaré la Première ministre.
Invoquant les « 1.160 amendements restants » et « les délais fixés par la Constitution », la cheffe du gouvernement a évoqué l’article 49.3 sur l’ensemble du texte. Cela permettra son adoption sans vote en première lecture à 23h41 ce jeudi, selon la présidente de l’Assemblée, Yaël Braun-Pivet, sauf si une motion de censure était déposée d’ici là.
Plus de 150 amendements retenus
Tentant de jouer la carte de l’apaisement, Elisabeth Borne a souligné que le texte final tenait compte des échanges en commission. Précisant notamment que « plus de 150 amendements ont été retenus, de la majorité comme des oppositions ».
La cheffe du gouvernement a notamment cité des mesures pour le « meilleur financement des services à domicile », « l’accroissement des contrôles des Ehpad », « le renforcement de la permanence des soins », « une meilleure prise en charge des enfants en situation de polyhandicap » ou encore « la prise en charge à 100 % des prothèses capillaires pour les femmes atteintes de cancer ».
Insuffisant, selon la gauche. « Le gouvernement nous a autorisés à examiner neuf articles sur 53, il a fait son tri dans les amendements à sa convenance. Progrès social ? Non. Arnaque sociale et sanitaire », a critiqué le communiste Pierre Dharréville. « A cette voie autoritaire, le gouvernement aura ajouté le cynisme et le désordre », a tancé Eric Coquerel (LFI).
« L’humiliation »
Après avoir demandé à plusieurs reprises, et sans succès, des prolongations et des séances supplémentaires pour examiner le millier d’amendements – une demande également formulée par Les Républicains -, les députés de gauche ont finalement quitté l’hémicycle. « On ne souhaite pas participer à cette mascarade », a lancé Pierre Dharréville, Cyrielle Chatelain, pour sa part, demandant du « respect pour la représentation nationale ».
« A la brutalité du 49.3, ils ont ajouté l’humiliation », a déploré le socialiste Jérôme Guedj. « Tous les articles ont été votés, nous avons tous pris part aux votes. On a fait le boulot sincèrement avec honnêteté. En réponse, on a de la malhonnêteté », a abondé l’insoumise Ségolène Amiot. Les députés RN étaient également absents de l’hémicycle lors de la déclaration de la Première ministre.
Doutes sur la motion de censure
Reste à savoir si une motion de censure sera déposée cette fois-ci. La gauche est divisée sur la question. Les députés écologistes n’en déposeront pas, a confirmé dès mercredi la cheffe de file Cyrielle Chatelain, les autres groupes de la Nupes n’ayant pas encore officiellement fait connaître leur décision, tout comme le RN.
En attendant, le calendrier législatif suit son cours. Le projet de loi doit passer en commission au Sénat mercredi prochain. Pour rappel, le projet de budget de la Sécurité sociale anticipe une forte baisse du déficit à 7,2 milliards en 2023 contre 17,8 milliards cette année, reposant sur une fonte spectaculaire de la facture Covid.