Le projet de loi ouvrant la voie à la réforme de l’assurance-chômage à peine adopté par le Parlement , Olivier Dussopt en lèvera le voile ce lundi matin. Le ministre du Travail va préciser aux partenaires sociaux comment les règles d’indemnisation sont appelées à évoluer selon la santé du marché du travail, selon le principe dit de « contracyclicité ». Avec une première application à compter du 1er février prochain, centrée sur la seule durée de versement des allocations, au grand dam des syndicats.
Pour le gouvernement, les règles actuelles n’incitent pas assez à la reprise d’un emploi dans une période faste, comme – plaide-t-il – c’est le cas actuellement avec la coexistence de difficultés de recrutement au plus haut et un taux de chômage encore élevé (en tout cas supérieur à la moyenne des pays de l’OCDE). D’où l’idée de les rendre plus ou moins généreuses selon la conjoncture économique.
Pas mal d’exceptions
Toute modification du montant de l’allocation ayant été écartée dès le début, c’est sur le nombre de mois durant lesquels elle est versée que va s’appliquer la réforme. Actuellement, cette durée correspond au nombre de jours travaillés ou non compris entre le premier et le dernier jour sous contrat dans les 24 mois précédents (36 au-delà de 53 ans) l’ouverture des droits.
L’idée est d’appliquer un coefficient réducteur – de 0,8 à 0,9 selon les chiffres qui circulaient en fin de semaine – sachant, point majeur, que le plancher actuel de six mois sera maintenu. Olivier Dussopt l’a assuré lundi dernier lors d’une rencontre organisée par l’Association des journalistes de l’information sociale.
En attendant de connaître la valeur précise, les avis étaient déjà divergents. D’un côté ceux qui s’attendent à ce que la montagne accouche d’une souris avec un coefficient proche de 1 pour confirmer la volonté de réforme mais sans trop heurter politiquement. De l’autre ceux pour qui 0,8 est insuffisant si l’on veut un véritable effet.
La possibilité in fine que ce coefficient ne s’applique pas à tous les chômeurs, comme il se murmure, donne plutôt raison aux premiers. En seraient exclus, selon nos informations, les intermittents du spectacle, les dockers, les pêcheurs embarqués, les personnes licenciées pour motif économique bénéficiant d’un contrat de sécurisation professionnelle (CSP) ou encore, sur le plan géographique, les territoires ultramarins.
Période verte ou rouge
Le deuxième paramètre majeur de la réforme concerne l’indicateur permettant de juger d’un changement d’état du marché du travail et donc d’appliquer le coefficient réducteur ou non. Le gouvernement en aurait retenu deux, toujours selon nos informations : la valeur absolue et la variation du taux de chômage mesuré par l’Insee au sens du Bureau international du travail.
En clair, on passerait d’une période favorable (emploi abondant et donc application du coefficient réducteur) à une période difficile (emploi rare et donc maintient des durées actuelles) si le taux de chômage franchit la barre des 9 % par exemple, et réciproquement. Mais l’application de ce coefficient ou son gel interviendrait aussi si le taux de chômage gagne ou perd plus de x point de pourcentage d’un trimestre à l’autre, la valeur x étant supposée refléter une forte variation.
Pérennisation
En attendant de connaître les arbitrages précis du gouvernement, une chose est sûre : à 7,3 % actuellement, le taux de chômage est considéré comme se situant dans le vert . La réduction de la durée d’indemnisation, même limitée dans sa valeur ou par le nombre de personnes concernées, entrera donc en vigueur dès le 1er février prochain, jour J prévu pour la réforme. Les premiers impacts se feront sentir à partir du 1er août, compte tenu du plancher de six mois.
L’injection d’une dose de contracyclicité dans les règles d’indemnisation n’est censée s’appliquer que jusqu’à fin décembre 2023, le temps pour les partenaires sociaux de négocier un nouveau cadre de gouvernance du régime d’assurance-chômage.
Sauf qu’Olivier Dussopt n’a pas fait mystère de la suite. « La contracyclicité, a-t-il dit toujours devant l’Ajis, est l’un des nouveaux éléments structurels de l’assurance-chômage ». En tant que tel, son principe figurera dans les attendus de la négociation des partenaires sociaux des futures règles d’indemnisation qui suivra celle sur la gouvernance début 2024. Le fait que les sénateurs ( lors de l’examen du projet de loi , NDLR) l’aient inscrit dans la loi « est aussi une manière pour moi d’envisager et de permettre sa pérennisation », a ajouté le ministre du Travail.