Dernière phase de la concertation express sur l’emploi . La ministre du Travail, Muriel Pénicaud, reçoit un par un les partenaires sociaux ces vendredi et lundi, avant de rendre ses propositions à Emmanuel Macron, qui communiquerait ses arbitrages le 23 ou 24 juin, laisse-t-on entendre. Au menu de ces bilatérales : assurance-chômage , travailleurs détachés, jeunes, formation et évolution du dispositif de chômage partiel. C’est sur ce dernier thème que les choses ont le plus avancé, dans un sens qui commence à faire grincer des dents côté patronat, mais surtout syndicats.
Devant l’incapacité de maintenir trop longtemps le dispositif d’activité partielle (le nom légal du chômage partiel) au niveau auquel il a été porté avec le confinement, le gouvernement a commencé à réduire la voilure . Depuis le 1er juin, les employeurs ne sont plus remboursés non plus à 100 % mais à 85 % de ce qu’ils versent à leurs salariés (70 % du brut ou 84 % du net). Ils supportent donc un reste à charge de 15 %. Au niveau du SMIC, l’Etat et l’Unédic les remboursent toujours à 100 % et le salarié ne perd rien non plus. Cela reste un dispositif sans commune mesure avec ce qui se pratique ailleurs.
Nouvelle baisse
Le régime de croisière du dispositif appelé à prendre la suite au moins jusqu’à la fin du quinquennat passera donc par une nouvelle baisse des niveaux de prise en charge , comme dévoilé mercredi par « Les Echos » : le salarié toucherait de 70 à 72 % de son net (soit 60 % de son brut, 100 % au SMIC) et l’employeur supporterait un reste à charge de 20 % environ. « Les entreprises payeront un petit peu plus, de l’ordre de 10 % », a confirmé Agnès Pannier-Runnacher, ce vendredi sur BFM TV. Pour les salariés, il y aura aussi « une incitation pour une reprise de travail », a ajouté la secrétaire d’Etat auprès de Bruno Le Maire, mais sans donner d’indication chiffrée.
Les curseurs définitifs seront connus sous peu et, de fait, pour la partie salarié, resteraient plus généreux que ce qui se pratique en Allemagne, source d’inspiration du ministère. Qu’importe, les syndicats voient cela d’un mauvais oeil.
« S’il est question de baisser la prise en charge pour les travailleurs dans les semaines et les mois qui viennent, c’est une folie ! », a lancé jeudi le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, lors d’un « grand débat » en visioconférence entre les dirigeants des principales organisations patronales et syndicales, organisé par l’Association des journalistes de l’information sociale (Ajis). Même position de la part d’Yves Veyrier pour FO. Le modèle allemand ? « Très mauvaise idée », a-t-il tranché, lui aussi réfractaire à toute baisse de ce que touchent les salariés.
Gagner un peu de temps
Les réactions étaient plus nuancées du côté patronal. Pour le Medef, Geoffroy Roux de Bézieux s’est montré ouvert à revoir le dispositif « si et seulement si » les chiffres sur le nombre de salariés placés en chômage partiel « sont fiables ». A ce stade, le ministère du Travail estime que 7,2 millions d’entre eux ont été concernés en mars, et 8,6 millions en avril (les chiffres de mai ne sont pas encore connus). Le dernier budget rectificatif, lui, a réévalué la facture totale de 5 milliards, à 31 milliards. Le président de l’U2P, Alain Griset, affirme pourtant que le coût final sera important, mais « beaucoup, beaucoup moins important que ce qui avait été dit au début ».
Derrière ces arguments ne se cachent pas tant un refus des futurs taux de prise en charge tels qu’ils se dessinent que la volonté de maintenir le dispositif actuel encore quelque temps : Medef et U2P souhaitent que les changements n’interviennent pas avant septembre car ils estiment qu’on y verra mieux alors sur l’état de la reprise. Le gouvernement envisage plutôt début juillet.
Deuxième dispositif
Reste à connaître les contours de l’autre dispositif de chômage partiel taillé pour les entreprises à cycles longs, plutôt dans l’industrie, avec engagement de maintien de l’emploi notamment. Baptisé à ce stade « Activité réduite pour le maintien en emploi » ou ARME , il sera soumis à accord d’entreprise pour une durée de six mois minimum, deux ans maximum. Pour inciter les employeurs à en conclure, l’Etat pourrait maintenir les niveaux de remboursement en cours depuis le 1er juin, laisse-t-on entendre. Il réduirait en revanche à 50 %, soit de moitié par rapport à ce qu’il fait depuis le confinement, sa prise en charge des formations via le Fonds national de l’emploi pour les salariés concernés par une réduction du temps de travail.