Dans deux mois et demi, le passage du droit individualisé à la formation (DIF) laissera place au Compte personnel de formation (CPF). Une transition pendant laquelle beaucoup de salariés pourraient perdre leurs droits à la formation. Seul un salarié sur quatre a déjà transféré ses heures de l’ancien dispositif vers le nouveau. Le gouvernement envisage désormais un report de la date butoir.
Comment faire les démarches ? Comment sont calculés les droits ? Les explications de CQFD.
1. Qu’est-ce que c’est ?
Le compte personnel de formation (CPF) est utilisable par tout salarié, tout au long de sa vie active, y compris en période de chômage. Il recense les droits acquis par le salarié et les formations qualifiantes ou certifiantes dont il peut personnellement bénéficier.
Il est ainsi possible de l’utiliser pour obtenir un diplôme, pour apprendre une langue, pour obtenir de l’aide dans la création de son entreprise ou encore pour financer son permis. Les membres d’une profession libérale, les travailleurs indépendants, les conjoints collaborateurs et les personnes à la recherche d’un emploi peuvent en bénéficier.
Le CPF remplace, depuis 2015, le droit individuel à la formation (DIF). Mais les crédits collectés au titre du DIF avant 2015 ne sont pas automatiquement basculés vers le CPF. « Les salariés ne perdent pas les heures acquises au titre du DIF. Ils doivent les intégrer au CPF avant le 31 décembre 2020 pour les conserver », précise le site officiel de l’administration française. Grande nouveauté, ce dispositif, créé en 2014, est désormais crédité en espèces.
2. Comment l’utiliser ?
Autre grand changement, le CPF est, depuis le 21 novembre 2019, utilisable sans intermédiaire, via une application intitulée « Mon compte formation ». Son utilisation se fait donc à la seule initiative de l’employé, qui après avoir téléchargé l’application et renseigné son numéro de sécurité social, connaît instantanément le montant en euro de ses droits.
Il peut ensuite consulter la totalité des formations proposées. Contenu, prix, modalités d’inscription, localisation : toutes les informations nécessaires sont recensées. L’utilisateur peut demander en ligne son inscription à la formation de son choix. Une réponse sera apportée à sa demande dans les 48 heures. Une fois la formation effectuée le titulaire du CPF confirme en avoir bénéficié. Le paiement de l’organisme est ensuite déclenché.
Les formations sont accessibles sur le temps de travail, ainsi qu’en dehors. A noter toutefois, dans le premier cas de figure, une autorisation de l’employeur est nécessaire. Elle est à demander au moins 60 jours avant le début de la formation, ou 120 jours avant si celle-ci dure plus de six mois.
Pendant ce temps de formation, la rémunération du salarié reste inchangée. Si elle se déroule sur du temps libre en revanche, la formation ne donne pas le droit à une rémunération supplémentaire.
3. Quel est l’objectif ?
L’objectif du gouvernement est de permettre à n’importe quel individu, de reprendre en main sa formation, et de choisir, s’inscrire et payer, à l’aide des euros attachés à son compte personnel de formation (CPF), en quelques clics seulement.
Le gouvernement espère ainsi favoriser le maintien de l’employabilité, alors que les métiers évoluent et que trop peu de salariés accèdent à la formation. Les cadres en bénéficient deux fois plus que les ouvriers et les salariés des grandes entreprises deux fois plus que ceux des TPE.
La promesse semble porter ses fruits. Fin décembre, le ministère du Travail revendiquait 600.000 téléchargements, 50.000 demandes de formation, dont 32.000 déjà validées. Si la crise du coronavirus a fait chuter, de 20.000 à 6.300 en moyenne, le nombre de demandes depuis le confinement, l’application suscite toujours l’intérêt.
Les demandes « ne se sont pas écroulées grâce aux formations à distance dont le nombre a été multiplié par plus de deux depuis début mars », explique aux Echos Michel Yahiel, directeur des retraites et de la solidarité à la Caisse des Dépôts, l’institution responsable du compte de formation. Elles représentaient même 70 % des inscriptions depuis le 12 mars.
4. Comment sont calculés les droits ?
Le CPF est alimenté automatiquement au début de l’année qui suit l’année travaillée, en fonction du temps de travail enregistré sur le compte du titulaire. Pour un salarié qualifié à temps plein, ou à temps partiel, l’alimentation du compte se fait à hauteur de 500 euros par année de travail, dans la limite d’un plafond de 5.000 euros. Même chose pour un travailleur indépendant.
Les salariés non qualifiés bénéficient quant à eux de 800 euros par année de travail, dans la limite d’un plafond de 8.000 euros pour un salarié à temps plein. A noter : les personnes à mi-temps, à 80 % des femmes, bénéficient des mêmes droits à la formation que les salariés à temps plein. Les heures DIF non utilisées, et celles acquises au titre du CPF avant le 1er janvier 2020, seront pour leur part être converties en euros, à raison de à raison de 15 euros l’heure.
5. Comment faire basculer ses droits ?
L’enjeu pour les salariés est de ne pas perdre, début 2021, leurs droits acquis avant 2015, au titre du DIF, le précédent dispositif. En CDI, le DIF était alimenté à raison de 20 heures par an et plafonné à 120 heures. Seulement, à deux mois et demi de la date limite, seul un salarié sur six a réalisé les démarches pour transférer ces heures sur le CPF.
Car encore faut-il que les titulaires d’un CPF soient informés de la démarche à suivre. Ce qui est loin d’être le cas. Près de six salariés sur dix ignorent qu’ils peuvent faire basculer leurs droits, d’après un sondage réalisé par Ipsos pour le compte de l’organisme Wall Street English. En moyenne pourtant à la clé : un crédit de 1.257 euros. Au total, plus de 12 milliards d’euros pourraient disparaître. Les trois-quarts des 20 millions d’actifs du secteur privé qui n’ont pas encore fait les démarches vont peut-être disposer d’un répit. La ministre du Travail, Elisabeth Borne, vient en effet de demander à ses services d’étudier la possibilité de repousser la date butoir du 31 décembre 2020.