Officiellement, le gouvernement commence à poser les jalons de la fin du « quoi qu’il en coûte » d’Emmanuel Macron. Mais du point de vue des finances publiques, la différence n’est pas encore flagrante. Ainsi l’exécutif va proposer de rajouter entre 9 et 10 milliards d’euros supplémentaires au projet de loi de Finances pour 2021 qui revient la semaine prochaine en discussion à l’Assemblée, afin d’aider les entreprises en difficultés et les précaires.
C’est le rapporteur général du Budget à l’Assemblée qui a tiré le premier pour appeler à renforcer les mesures économiques d’urgence. Il faut rajouter « une dizaine de milliards d’euros », a plaidé ce jeudi matin sur RTL Laurent Saint-Martin . « Je demande que le gouvernement fasse bien attention à ce que les premières semaines de l’année 2021 soient bien couvertes par ces mêmes mesures d’urgence », a insisté le député LREM.
De fait, l’exécutif travaille bien, selon nos informations, à rajouter entre 9 et 10 milliards d’euros. Le chiffrage pourra varier, si jamais le gouvernement ne dépense pas tous les crédits prévus pour 2020 pour ces mêmes mesures d’urgence. Début novembre, Bercy avait fait voter une enveloppe large de 20 milliards d’euros supplémentaires pour faire face aux conséquences du deuxième confinement .
Zéro euros pour l’urgence
Cette rallonge supplémentaire d’une dizaine de milliards d’euros n’est pas en soi une surprise. Le projet de loi de Finances pour 2021 – dévoilé en septembre dernier quand le gouvernement jurait la main sur le coeur qu’il ferait tout pour qu’il n’y ait pas de deuxième vague épidémique – comportait ainsi… zéro euro pour les mesures d’urgence supplémentaires. Un scénario logique, dans la mesure où l’on tablait alors sur une forte reprise. Mais il y a quelques semaines, Bercy avait prévenu qu’il allait revoir ses calculs.
« Avec une dizaine de milliards d’euros, cela nous permettrait d’abonder en crédits nécessaires le fonds de solidarité, le dispositif de chômage partiel, mais aussi la nouvelle aide pour les jeunes annoncée par Emmanuel Macron », a détaillé aux « Echos » Laurent Saint-Martin. Le député ajoute qu’il s’agit « d’une enveloppe assez large pour traiter les effets de la deuxième vague ». En clair, il faudrait encore rajouter au pot en cas de troisième vague.
Dans le détail, le gouvernement a musclé depuis le mois de novembre le fonds de solidarité pour les secteurs les plus en difficulté – ceux fermés administrativement comme les restaurants, les bars, la culture, mais aussi ceux quasi à l’arrêt comme le tourisme, l’événementiel. Désormais, quelles que soient leurs tailles, les entreprises de ces filières peuvent toucher une aide mensuelle représentant jusqu’à 20 % de leur chiffre d’affaires mensuel équivalent de 2019. Bercy a déjà indiqué que le dispositif coûtait plus de 3,5 milliards d’euros par mois. En revanche, les entreprises des autres secteurs cesseront de toucher l’aide mensuelle de 1.500 euros à partir du 1er janvier prochain.
Le chômage partiel renouvelé
Concernant le dispositif de chômage partiel, la ministre du Travail, Elisabeth Borne, a indiqué mercredi soir que les entreprises « fermées totalement ou partiellement » continueront d’être remboursées à 100 % de l’indemnisation versée à leurs salariés couverts par ce dispositif « aussi longtemps que les fermetures » dureront. Cela devait normalement s’arrêter à la fin de cette année, mais la ministre dit souhaiter qu’on aille « jusqu’à fin février ».
Enfin, Emmanuel Macron avait indiqué la semaine dernière, lors de son entretien au média Brut , qu’il envisageait « sans doute une nouvelle aide exceptionnelle » pour les jeunes en précarité en janvier ainsi qu’une « amélioration du système de bourses ». Le chef de l’Etat avait fait référence à l’aide de 150 euros déjà versée deux fois (juin et novembre) cette année aux jeunes bénéficiant des aides au logement ainsi qu’aux étudiants boursiers.
Cette facture rallongée va alourdir un peu plus le déficit pour l’an prochain. Il y a quelques jours, Olivier Dussopt, le ministre délégué aux Comptes publics, avait expliqué que la nouvelle prévision dégradée de croissance pour l’an prochain poussait automatiquement le déficit au niveau de 7,8 % du PIB (contre -6,7 % espérés en septembre). La dizaine de milliards supplémentaire va pousser la jauge au-dessus de 8 %. Les nouvelles prévisions doivent être dévoilées ce vendredi.