L’atterrissage a été moins violent qu’anticipé pour les finances locales en 2020 au terme de la première année de crise sanitaire. « Les collectivités locales ont été relativement épargnées en comparaison de l’Etat et des organismes de Sécurité sociale », relève la Cour des comptes dans le premier volet de son rapport sur les finances publiques locales présenté ce mercredi. Un constat déjà fait par Olivier Dussopt, le ministre délégué aux Comptes publics .
« L’impact n’en demeure pas moins réel, interrompant plusieurs années de contexte favorable qui avaient vu l’épargne des collectivités locales augmenter de près de 10 milliards d’euros en cinq ans », ajoute la Cour des comptes. En baisse de 10,3 % l’an dernier, leur épargne brute est redescendue à un niveau proche de celui de 2018, à 35 milliards d’euros. Quant à l’encours de leur dette, il a augmenté de 5,3 milliards d’euros, soit autant que sur toute la période 2015-2019.
La stabilité des produits fiscaux – tirée par les taxes foncières et d’habitation (+1,9 %) et la fiscalité économique (+3 %) – a permis d’atténuer le choc et notamment la baisse de 11 % des recettes fiscales et domaniales, souligne la Cour. Tout comme les mécanismes de soutien (crédits budgétaires, avances remboursables) mis en place par l’Etat face à la crise, qui ont joué pour un total de 711 millions d’euros.
« A la fin de l’année 2020, le bloc communal apparaît, à ce stade, comme relativement peu fragilisé par la crise sanitaire », note la Cour des comptes. Au global, l’épargne brute totale y est en baisse de 5,5 % (-8,5 % pour les communes).
Les grandes villes fragilisées
Avec toutefois des différences très marquées selon la taille des villes. Les moins peuplées conservent une épargne nette « quasiment identique » à celle de 2019. Mais dans les communes de 50.000 à 100.000 habitants, elle a fondu de 24,1 % en moyenne. La chute est encore plus brutale dans celles de plus de 100.000 habitants (-81 %).
Dans sa réponse à la Cour des comptes annexée au rapport, France Urbaine, l’association des grandes villes et métropoles, regrette une fois de plus que les collectivités les plus peuplées « n’aient pas été ciblées par les dispositifs de soutien » alors qu’elles « sont, avec les territoires dépendant de recettes spécifiques (zones touristiques ou collectivités d’outre-mer), celles qui ont été le plus fragilisées dans leur capacité d’autofinancement ».
Du côté des départements, la dégradation des finances tient avant tout à la hausse de leurs dépenses sociales (+3,9 %), en particulier celles liées au revenu de solidarité active (RSA) . Les recettes de droits de mutation à titre onéreux (les « frais de notaire » acquittés par les acquéreurs d’un bien immobilier) ont, elles, beaucoup moins piqué du nez que prévu (-1,7 %).
Dans les départements de plus de 1 million d’habitants, la situation s’est davantage détériorée, avec une épargne brute en repli de 27 % en moyenne, contre – 14,6 % pour la moyenne départementale.
Hausse des dépenses sociales
En fin de compte, les « effets de la crise ont pu être absorbés en 2020 », selon la Cour. Mais les finances départementales « pourraient être davantage affectées en 2021 compte tenu de la dépendance accrue de leurs recettes à la conjoncture économique et du risque de progression des dépenses sociales », prévient-elle, faisant référence au remplacement de leur part de taxe sur le foncier bâti par une fraction de TVA. Ce qui « pourrait limiter, à terme, leur capacité à investir », anticipe-t-elle.
Les comptes des régions portent aussi les stigmates de la crise. Ce sont elles qui ont subi la plus forte baisse de leur épargne brute (-21,7 %), mais « elles partaient d’une situation d’ensemble plus favorable ».
Alors que leurs produits réels de fonctionnement ont baissé, elles ont continué à investir (+15 %) pour soutenir les entreprises frappées par la crise , avec une contribution de 500 millions d’euros au fonds national de solidarité ou la mise en oeuvre de fonds régionaux.
Endettement
Résultat, les régions se sont beaucoup plus endettées en 2020 qu’en 2019 (+131 %). Leur ratio de désendettement est passé de 4,3 ans à 6,1 ans. Quatre d’entre elles dépassent désormais le seuil de 9 ans, le « plafond d’alerte » dans la loi de programmation des finances publiques pour 2018-2022.
Mais, selon la Cour, les régions « demeurent en capacité de jouer un rôle actif » dans le cadre des mesures de soutien et de relance des secteurs économiques les plus touchés par la crise sanitaire.