Cela aurait pu être pire encore. Le déficit public s’est finalement établi à 9,2 % du PIB l’an dernier, selon les données publiées ce vendredi matin par l’Insee, soit un niveau inférieur au -11,3 % qui était prévu à la fin de l’année dernière . L’office statistique rappelle toutefois qu’il s’agit du « ratio de déficit le plus élevé depuis 1949 » et assez largement au-dessus de l’étiage atteint en 2009 après la crise financière, ce qui donne une idée du choc provoqué par la crise sanitaire.
De la même façon, le ratio de dette publique s’envole, sans toutefois atteindre complètement les altitudes redoutées il y a trois mois encore. Ainsi celui-ci a atteint 115,7 % du PIB l’an passé, quand la prévision de cet hiver était de 119,8 %. Mais il faut comparer cela au niveau de 97,6 % du PIB qui était celui de la France en 2019.
En monnaie sonnante et trébuchante, cela représente quand même une augmentation de 270,6 milliards d’euros sur un an, pour atteindre un total de 2.650,1 milliards ! De quoi donner une idée de l’effort qui s’annonce pour le pays s’il veut rembourser cette fameuse dette Covid, comme Bruno Le Maire s’y est engagé . «Les 18 points de dette supplémentaires en 2020 sont la traduction de la baisse d’activité de l’économie française et de l’effort de protection considérable de nos salariés et de nos entreprises. Quand l’activité économique se sera redressée, nous devrons commencer à rembourser cette dette suivant la stratégie que nous avons définie : croissance, maîtrise des dépenses publiques et réformes de structure», a commenté le ministre de l’Economie et des Finances.
Non surprises
Ce bilan moins lourd que prévu n’est pas une surprise, le ministre des Comptes publics ayant annoncé il y a quelques jours qu’il s’attendait finalement à un déficit « en dessous de 10 % ». La publication fin janvier des comptes de l’Etat avait montré que celui-ci avait réussi à limiter les pertes fiscales en fin d’année du fait d’un deuxième confinement moins dévastateur économiquement que le premier, tandis que les comptes de la Sécurité sociale avaient partiellement limité les dégâts (avec un déficit de 38,9 milliards malgré tout !) grâce à une masse salariale moins touchée que prévu.
Du point de vue des finances publiques, cette plongée un peu moins profonde qu’annoncée est d’autant plus une bonne nouvelle que l’année 2021 s’annonce encore une fois compliquée. Même si le gouvernement espère toujours atteindre une croissance de 6 % cette année, les nouvelles mesures de restriction sanitaire devraient peser sur l’activité. Surtout les aides aux entreprises vont gonfler plus que prévu, alourdissant un peu plus le déficit et la dette publics. Selon la dernière estimation, celles-ci devraient finalement coûter «autour de 32 milliards d’euros», dont «18 milliards pour le fonds de solidarité, 11 milliards pour l’activité partielle et environ 3,5 à 4 milliards d’euros pour les exonérations de cotisations sociales», a indiqué Olivier Dussopt à l’AFP.
Violence du séisme
Au final, même si la dégradation est moindre qu’anticipée, le détail des données publiées par l’Insee donne une idée de la violence du séisme qui a secoué les comptes publics l’an dernier. En volume (corrigé de l’inflation), les recettes ont ainsi chuté de 63,1 milliards d’euros, soit une baisse de 5,4 % par rapport à 2019. A titre de comparaison, le chiffre avait été de -3 % en 2009. Toutefois, il faut noter que cette baisse est moins forte que celle du PIB. Si bien que le ratio de prélèvement obligatoire remonte fortement à 44,7 % du PIB, son niveau de 2018. Ce n’est pas vraiment le chemin que l’exécutif avait envisagé, lui qui promettait une forte baisse sur le quinquennat du fait des 40 milliards d’euros de baisses d’impôt déjà engagées.
Du côté des dépenses, celles-ci bondissent en volume de 4,9 % (4,1 % en 2009). Les dépenses publiques ont donc représenté l’an dernier l’équivalent de 62,1 % du PIB, un niveau jamais atteint dans les comptes publics modernes d’après guerre. Tous les postes ou presque sont concernés. Les dépenses de fonctionnement ont connu une hausse de 2,3 %, du fait notamment des effets du «Ségur de la Santé» qui a dopé la rémunération des soignants. Les prestations sociales ont crû de 8 % également.
Seule exception, les intérêts versés au titre de la dette ont reculé une nouvelle fois de 14,4 % malgré l’envolée de l’endettement. La conséquence de la nouvelle ère de taux négatifs.