Progressivité et lisibilité. Devant les partenaires sociaux réunis jeudi pour échanger sur la sortie de crise , Bruno Le Maire a été catégorique : ces deux principes doivent guider les arbitrages à venir sur l’évolution des aides d’urgence, au fur et à mesure que prendront fin les mesures de restrictions sanitaires . « Nous n’avons pas fait tout ce travail pour laisser ensuite la brutalité reprendre le dessus », a répété le ministre de l’Economie, des Finances et de la Relance lors d’un point de presse, dans la foulée de la concertation.
« Quand on a pris en charge quasiment depuis un an la rémunération de millions de salariés, on ne va pas faire preuve de précipitation dans l’évolution des aides en mettant en péril cet investissement », a confirmé la ministre du Travail, Elisabeth Borne, à l’issue d’une rencontre qualifiée par le président de l’U2P, Dominique Métayer, de « bel exemple de dialogue social et économique entre le gouvernement et l’ensemble des partenaires sociaux ». L’exercice était néanmoins délicat du fait de l’absence, à ce moment-là, de calendrier de levée des restrictions sanitaires générales ou même sectorielles.
« Trous dans la raquette »
Si patronat et syndicats étaient tous présents, les discussions ont porté avant tout sur le dispositif d’aide aux entreprises. L’officialisation du prolongement de la possibilité de contracter un prêt garanti par l’Etat de six mois , soit jusqu’au 31 décembre, qui fait « consensus » – a dit Bruno Le Maire -, a été effectivement bien accueillie. Même si cela ne va pas provoquer une explosion des demandes, car rares vont être les entreprises à se décider tardivement, explique en substance un représentant patronal. Sauf que le PGE pourra servir aussi à rembourser des dettes fournisseurs, ce qui n’était pas le cas jusque-là.
Le ministre a néanmoins exclu d’utiliser ces prêts pour restructurer les dettes financières, a-t-il affirmé devant la presse, là où un responsable patronal a compris, lui, qu’il allait tout de même en parler avec les banques. Il a par ailleurs été annoncé le prolongement de l’exonération de 20 % des cotisations patronales pour les employeurs le plus impactés par la crise économique « en avril et sans doute en mai », selon une source patronale.
Deux scénarios
Sur le sujet épineux de l’avenir des aides du fonds de solidarité , le ministre de l’Economie a présenté deux scénarios : une baisse proportionnelle à la reprise du chiffre d’affaires ou une baisse de 25 % par mois pendant trois mois, affirmant que le second avait sa préférence. « Avec le Medef, on l’a alerté sur le risque de trous dans la raquette », rapporte Eric Chevée, vice-président de la CPME en charge du social. « Pour certaines activités comme le tourisme international ou l’événementiel, la reprise ne sera pas immédiate, il faut un filet de sécurité », explique-t-il.
« Une réduction en sifflet sur trois mois ne peut pas convenir à tout le monde », a insisté Geoffroy Roux de Bézieux, qui avait alerté mardi sur les dangers d’un « stop-and-go » . « Des réglages fins restent à faire pour être sûr qu’aucun secteur d’activité ou aucune entreprise ne se retrouvent en difficulté », a admis Bruno Le Maire.
Prudence sur l’activité partielle
Sur l’activité partielle, le gouvernement a été plus prudent sur le calendrier qu’il ne l’avait envisagé initialement . Elisabeth Borne a confirmé le principe d’une bascule qui peut être rapide vers le régime cible pour les secteurs non protégés, et des paliers intermédiaires pour les autres, avec une première étape de 15 % de reste à charge par exemple.
« Nous sommes tous d’accord qu’on ne peut pas faire bouger les règles pour les secteurs protégés tant que les entreprises subissent des restrictions sanitaires », a-t-elle expliqué. Plus question, donc, d’afficher la date du 1er septembre. « La dégressivité des mesures de compensation doit accompagner l’assouplissement des restrictions, tout va donc dépendre des protocoles sanitaires », résume Geoffroy Roux de Bézieux.