Covid : le nombre de foyers bénéficiaires du RSA franchit le seuil de 2 millions

La crise sanitaire a fait bondir le nombre de personnes allocataires du revenu de solidarité active à un niveau jamais atteint. La hausse représente +8,5 % en septembre par rapport à une situation sans crise sanitaire. La dépense de RSA est désormais supérieure à 1 milliard d'euros par mois.


This picture taken on February 23, 2018, shows the family benefits fund logo ("CAF" Caisse d Allocations Familiales) in Lille. (Photo by PHILIPPE HUGUEN / AFP)

Triste record. Le seuil de 2 millions de foyers allocataires du revenu de solidarité active (RSA) vient selon toute vraisemblance d’être franchi. « C’est en substance ce que montrent les données, même si nous sommes prudents avec les chiffres les plus récents », reconnaît-on à la Sécurité sociale.

Jamais en onze ans d’existence cette prestation n’avait connu telle demande (le nombre de bénéficiaires du RMI, le dispositif précédent dont le périmètre était plus restreint, avait franchi le seuil de 1 million en 1997) et c’est la crise du Covid qui est la cause de cette envolée. En prévision de cette aggravation qui ne fait que commencer , le Premier ministre, Jean Castex, a présenté un plan de lutte contre la pauvreté le 25 octobre.

Le franchissement du seuil transparaît à la lecture de données semi-définitives publiées tout récemment par la Caisse nationale d’allocations familiales (CNAF). « Si la crise sanitaire ne s’était pas produite, le nombre d’allocataires du RSA serait resté quasiment stable pendant les trois premiers trimestres de l’année 2020. En août et septembre, l’écart à la situation’contrefactuelle’est de 8,5 % », écrit-elle.

Le gestionnaire de la branche Famille de la Sécurité sociale a publié le point conjoncturel qui retrace les évolutions de la prestation jusqu’en juin (juin est encore à l’état d’estimation). Au mitan de l’année, le nombre de bénéficiaires était probablement de 1,99 million de foyers, révèle-t-il, « correspondant à une croissance de 6,2 % par rapport à juin 2019, soit 120.000 allocataires de plus ». Pour mars, le décompte a été révisé à la hausse à 1,92 million de foyers.

Quant aux dépenses de RSA, elles ont crû de 4,3 % au deuxième trimestre par rapport au premier trimestre et s’élevaient à 1 milliard d’euros par mois.

Pas d’afflux massif de nouveaux allocataires

L’augmentation du nombre de bénéficiaires du RSA doit pour l’instant bien plus à la baisse des sorties du dispositif qu’à un afflux de nouveaux allocataires (sachant que contrairement aux idées reçues, les entrées et sorties représentent en permanence des flux importants). En mars, quand le premier confinement a été instauré, les caisses d’allocations familiales ont automatiquement prolongé les droits déjà ouverts, rétablis les allocataires suspendus de leurs droits suite à contrôle, et renoncé à contrôler qui que ce soit. « Pour une part majoritaire, ces mesures ont anticipé le paiement de droits qui auraient été dus », note la CNAF. Les entrées aussi ont subi un coup de frein grâce à l’activité partielle qui a évité un mouvement brutal, et à la prolongation des droits à chômage pendant le premier confinement.

« A partir du mois de juin, la détérioration de la situation économique (notamment les moindres opportunités d’emploi) explique l’évolution du nombre de foyers allocataires », analyse la caisse nationale. Les sorties du dispositif demeurent inférieures à la normale (110.000 sorties de moins que s’il n’y avait pas eu de crise sanitaire), mais cette fois à cause de l’impossibilité pour les bénéficiaires de trouver des sources de revenus. Par ailleurs, 20.000 personnes qui avaient tout juste réussi à sortir du RSA au deuxième trimestre y sont retournées au troisième.

« En revanche, les entrées dans le droit des nouveaux allocataires sont comparables à la « situation contrefactuelle » depuis mars 2020 », écrit la CNAF. Autrement dit, les faillites et les licenciements qui ont commencé à se multiplier à travers le pays n’ont pas encore eu pour conséquence l’afflux de nouveaux pauvres en fin de droits, n’ayant plus comme dernier filet de sécurité que le RSA. Cela risque de venir plus tard.

Il y a par ailleurs les jeunes entre 18 et 25 ans qui se présentent en 2020 sur un marché du travail dévasté, et pourraient espérer un secours financier. Mais ceux-là n’ont pas droit au RSA, à quelques milliers d’exceptions près, et ne viennent donc pas bousculer les statistiques officielles.


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