Faute d’adultes en nombre suffisant, il va falloir vacciner des enfants. Le président du comité d’orientation de la stratégie vaccinale contre le Covid, Alain Fischer, estime qu’il faut commencer à vacciner massivement les 16-17 ans «courant juin», autrement dit, «très vite après» avoir rendu éligibles l’ensemble des adultes, le 31 mai . Cet immunologiste qui conseille le gouvernement sur la conduite de la campagne vaccinale s’est exprimé vendredi sur BFMTV. Les jeunes peuvent d’ores et déjà bénéficier du vaccin mais en cas de maladies graves en France, le vaccin étant déjà autorisé aux plus de 16 ans au niveau européen.
Les scientifiques s’accordent pour dire qu’il faudrait vacciner une très grande proportion des adultes pour éteindre l’épidémie: près de 90%, ce qui représenterait 71% de la population. Alain Fischer a, quant à lui, évoqué la possibilité de parvenir à 90% voire 100% des adultes – «potentiellement, ça pourrait être au cours de l’été», a-t-il confié. Les vaccins seront là en quantité suffisante, les vaccinateurs aussi; mais les patients viendront-ils?
Selon le «M. Vaccin» du gouvernement, «pas loin de 80% des gens sont prêts» à se faire vacciner, ce qui est déjà un progrès depuis l’an dernier. Par effet d’entraînement, la vaccination Covid «se rapproche d’être une norme sociale», se réjouit-il. Mais cela ne suffira pas à atteindre l’immunité collective, surtout en présence de variants plus contagieux voire un peu plus résistants aux vaccins.
Des infirmiers libéraux au collège
D’où la nécessité d’abaisser encore le plancher d’âge. «Il n’est pas déraisonnable d’envisager» de vacciner aussi les adolescents de 12-15 ans «à la rentrée scolaire», «et si on peut, de les vacciner à l’école», a avancé Alain Fischer. La vaccination par les médecins scolaires était autrefois une pratique courante, a-t-il rappelé, et seule «la disparition presque complète» de cette spécialité y a mis fin. On pourrait cependant faire venir des infirmiers libéraux en vacation dans les collèges, a-t-il avancé, tout en signalant que sur cette tranche d’âge, le gouvernement n’en était qu’«au stade de la réflexion». Mi-mai, le Canada et les Etats-Unis ont donné leur feu vert à la vaccination des plus de 12 ans avec BioNTech/Pfizer, suite à un essai clinique rassurant. L’agence européenne du médicament planche dessus.
Les adolescents sont peu malades du Covid, voire pas du tout, si bien que l’on peut légitimement se poser la question du bénéfice individuel du vaccin dans leur cas. Cependant, ils sont «aussi contagieux que les adultes», a rappelé Arnaud Fontanet , épidémiologiste et membre du conseil scientifique Covid, vendredi, sur BFMTV. C’est donc le bénéfice collectif qui doit être recherché: vacciner les mineurs pour stopper l’épidémie.
Les moins de 12 ans «pas à l’ordre du jour»
En revanche, «les enfants de moins de 12 ans ne sont pas à l’ordre du jour», faute de données sur l’efficacité et la sécurité des vaccins pour cette tranche d’âge. Les essais cliniques ne font que débuter, si bien qu’ils ne seront pas éligibles avant 2022, «si jamais il devait y avoir» une vaccination des enfants, a souligné Alain Fischer.
Le médecin a toutefois présenté trois arguments à l’appui d’une extension de la vaccination aux plus jeunes. Cinq cents enfants en France ont contracté un rare syndrome inflammatoire multisystémique pédiatrique (PIMS), qui peut provoquer des atteintes cardiaques. De plus, les écoliers souffrent de troubles psychiques liés au chaos de la socialisation. Enfin, «ils contribuent à la circulation du virus», a conclu le scientifique.
En tout cas, les bénéfices individuels de la vaccination des mineurs risquent d’être beaucoup moins spectaculaires que pour les seniors. La première étude à grande échelle sur la vaccination en France a été publiée vendredi par le groupement d’intérêt scientifique Epi-Phare, regroupant l’Assurance-maladie et l’Agence nationale de sécurité du médicament. Près de 4 millions de plus de 75 ans ont été suivis au premier trimestre, dont 1,4 million vaccinés par Pfizer ou Moderna. Le risque d’hospitalisation chute de 87% une semaine après la deuxième dose et le risque de décès diminuerait de 91%.