Crise sanitaire : les sombres perspectives pour l’emploi

Muriel Pénicaud a reçu mardi les leaders syndicaux et patronaux pour examiner la situation et les perspectives du marché du travail. Fin 2020, le taux de chômage pourrait grimper jusqu'à 12 % selon les scénarios mis sur la table par le gouvernement.


Job seekers, wearing protective face masks, visit a National Agency for Employment (Pole Emploi) office in Nice after France reopened its agencies following the outbreak of the coronavirus disease (COVID-19), in France, May 18, 2020. REUTERS/Eric Gaillard

Premier volet d’une concertation éclair qui s’achèvera lundi 15 juin , avant peut-être une seconde salve, Muriel Pénicaud a reçu mardi après-midi les leaders syndicaux et patronaux pour examiner la situation de l’emploi et dessiner quelques perspectives, lesquelles, de l’avis de très nombreux économistes, s’annoncent sombres. Les chiffres de la Dares et l’Insee qui ont servi de base aux échanges avec les partenaires sociaux ne leur donneront pas tort même s’ils reposent, à ce stade, sur des hypothèses.

Le premier scénario esquissé – baisse de 11 % du PIB cette année et de 10 % à 15 % du recours à l’activité partielle par mois à compter de mai – conduirait à une perte de 1 million d’emplois et un taux de chômage de 12 % de la population active, contre 8,1 % fin 2019. Si le taux d’activité partielle baisse de 5 % à 8 % à compter de juin, l’impact serait « un peu » mois fort : -730.000 emplois et 11 %. Second scénario, le PIB recule de 10 %. Les estimations aboutissent alors à une perte de 300.000 emplois et à un taux de chômage de 10 % dans l’hypothèse de recul la plus forte du recours à l’activité partiel, ou de -180.000 et 9 % dans celle d’une sortie moins marquée.

La séance a aussi mis l’accent sur les jeunes qui risquent de payer cher la crise et pour lesquels le gouvernement veut mobiliser un plan global : entre 165.000 et 320.000 de plus pourraient se retrouver au chômage au second semestre par rapport à la fin 2019.

Et pour 2021 ? Avec un rebond du PIB de 7 % à 8 %, l’économie française créerait entre 700.000 et 900.000 emplois ce qui conduirait à un taux de chômage de 9 % à 9,5 %. Attention ont précisé les deux organismes statistiques, ces hypothèses sont « très fortes compte tenu du caractère exceptionnel de cette crise ».

Pic mi-2021

Un peu plus tôt dans la journée, c’est la Banque de France qui y était allée de ses prévisions . Résultat, l’économie française détruirait près de 1 million d’emplois en 2020 à cause de la pandémie. Le marché du travail s’ajustant avec un peu de retard sur l’activité, un peu plus de 100.000 emplois seraient encore détruits au premier semestre de 2021. En 2021, l’économie française créerait peu de postes mais elle n’en détruirait pas. Le taux de chômage atteindrait son pic dans la première moitié de l’année prochaine, touchant ainsi 11,8 % de la population active. Ce n’est qu’au second semestre 2021 qu’il commencerait à redescendre.

A partir de 2022, avec la reprise attendue de l’activité, les créations d’emplois reprendraient en flèche, atteignant presque 600.000 sur l’année pleine. Mais lors de l’élection présidentielle, le taux de chômage serait encore de 10,6 %.

Inconnues sur le comportement des Français

Au-delà des incertitudes macroéconomiques, comme le nombre de faillite, l’évolution de la demande et de l’investissement des entreprises, se greffe une autre inconnue qui rend ces prévisions plus risquées que d’habitude : quelle sera l’attitude des Français en âge de travailler ? « D’un côté, certaines personnes peuvent être découragées de chercher un emploi ou peuvent renoncer à entrer dans la vie active en prolongeant leurs études par exemple. De l’autre, les pertes de revenus des ménages peuvent inciter à la recherche d’emploi », notent les économistes de la Banque de France.


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