Les chiffres sont provisoires, mais ils n’en confirment pas moins que le marché du travail continue de reprendre des couleurs. Le nombre de déclarations d’embauches de plus d’un mois hors intérim a battu un record absolu en mai dans le champ concurrentiel en France hors Mayotte, selon les données publiées par la Caisse nationale des Urssaf (ex-Acoss). Celle-ci en a compté 785.549, un plus haut depuis janvier 2006. Le record concerne à la fois les CDD longs et les CDI, à hauteur de 402.756 et 382.793 respectivement.
La comparaison de ces chiffres n’a pas grand sens par rapport au mois de mai 2020, au plus bas de la crise du Covid. Elle l’est beaucoup plus si l’on se réfère au même mois de 2019. Il en ressort 43.600 déclarations de CDD longs et 37.800 déclarations de CDI en plus que sur la même période il y a deux ans. Et ce, malgré un PIB qui reste encore inférieur à ce qu’il était avant crise.
Effet de rattrapage
Ce pic historique traduit probablement « un effet de rattrapage, d’autant qu’il s’agit de CDI et de CDD de plus d’un mois », estime la Caisse nationale des Urssaf. Outre la dynamique des embauches liée au déconfinement , cette hausse traduit la configuration favorable du mois de mai, les lundis de fin de mois (comme le 31 mai 2021) enregistrant classiquement un pic d’embauches au titre du mois suivant, ajoute-t-elle.
Autre bonne nouvelle, un peu passée inaperçue : la hausse des embauches va de pair avec celle de leur qualité. Au premier trimestre , les CDI et les CDD longs représentaient 17,6 % et 19,6 % des 5 millions de recrutements comptabilisés sur la période, toujours selon l’ex-Acoss, des pourcentages en nette hausse par rapport ce qu’ils étaient avant crise. A contrario, la part relative des contrats de moins d’un mois est en baisse.
Tout cela confirme que « le marché du travail va mieux, qu’il va aller de mieux en mieux, sauf détérioration sanitaire, à défaut de pouvoir encore dire qu’il va bien », analyse Eric Heyer, économiste à l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). Prudent, ce dernier rappelle que si les déclarations d’embauches sont importantes, ce qui compte à l’arrivée, c’est le nombre de personnes en emploi.
Flux contre stock
De ce point de vue, la bonne tenue du premier indicateur permet de compenser une partie du chemin perdu par le second en un an, mais le compte n’y est pas encore : fin mars, l’économie française comptait 210.000 emplois en moins par rapport à la fin 2019, selon l’Insee. Si les embauches restent soutenues d’ici à la rentrée de septembre, alors le rattrapage est à portée de vue. A une inconnue près : les conditions de sortie de l’activité partielle qui concernait encore 2,7 millions de salariés en avril, mois marqué par un confinement (relatif) il est vrai.
En résumé, le marché du travail se caractérise en ce moment par des entreprises qui embauchent beaucoup d’un côté, et des entreprises qui, grâce à l’activité partielle, ne licencient pas de l’autre, d’où les difficultés à trouver de la main-d’oeuvre . « On encaisse les gains. Mais quid des pertes ? », résume Eric Heyer. La publication, d’ici à la fin de la semaine normalement, des chiffres de l’activité partielle sur le mois de mai permettra d’y voir un peu plus clair, mais pas encore complètement.
Dans ses dernières prévisions financières, l’Unédic prévoyait qu’il faudrait attendre fin 2022 pour que l’emploi salarié affilié à l’assurance-chômage retrouve quasiment son niveau de 2019. Des révisions, plus favorables, ne sont pas à exclure.