La réforme des retraites promise par Emmanuel Macron pendant la campagne électorale a été repoussée à la rentrée mais Force ouvrière se met déjà en ordre de bataille. Et pour cela, le sujet a fait l’objet d’une rédaction ciselée dans la résolution générale que vient d’adopter le congrès de la troisième confédération française qui s’est achevé vendredi matin ; une rédaction qui écorne le totem de l’objectif d’un retour aux 60 ans de l’âge légal de la retraite.
Le « mot d’ordre [de FO] de 2011 « 40 ans c’est déjà trop » » reste d’actualité, affirme le texte. Mais dans l’immédiat, l’urgence, c’est déjà le « blocage » du processus de réforme que prépare le gouvernement « avec un nouveau recul de l’âge de départ, l’allongement de la durée de cotisations et la remise en cause des régimes existants ». En clair le maintien du statu quo, dont les 62 ans. Cela « constituera une avancée pour revenir à la retraite à 60 ans à taux plein et dans la perspective du retour à 37,5 ans de cotisations », explique le texte adopté à la quasi-unanimité.
Nouvelle formule
La résolution générale de 2018 disait tout autre chose puisqu’elle affirmait que « le Congrès est on ne peut plus légitime à exiger le retour à une loi de justice sociale […] : retraite à 60 ans sur les dix meilleures années pour le privé et maintien sur les six derniers mois pour le public ». Et elle précisait que ce devrait être pour FO la « base de négociation ».
La nouvelle formulation n’a pas plu à tous, évidemment. La discussion s’est focalisée sur un amendement pour le retour à une version de type 2018. Rejeté en commission, cet amendement a été de nouveau présenté en assemblée plénière par le breton Eric Lecourtois, de la sensibilité anarchiste. Il demandait qu’il soit soumis à un vote du congrès, ce qui lui a été refusé sans susciter de bronca. Seules quelques mains se sont levées contre la résolution générale, qui avait recueilli au sein de la commission chargée de la travailler avant sa présentation au congrès l’unanimité moins 17 abstentions. La démarche répond à un souci d’efficacité pour tenter de contrer la réforme des retraites.
L’enjeu du grand chelem
La recherche d’un statu quo sur l’âge permet en effet d’envisager une unité syndicale bien plus large que le retour aux 60 ans qui ne sont pas dans le scope de la CFDT. Dans sa réponse au débat sur le rapport d’activité, l’avant-dernier jour du congrès, le secrétaire général sortant, Yves Veyrier, qui a passé la main vendredi à Frédéric Souillot, avait évoqué cet enjeu de réaliser le grand chelem en commençant par prendre la salle à contrepied.
Il s’était en effet adressé aux militants « déplorant en premier lieu que l’unité syndicale n’ait pas été réalisée » ; les mêmes qui, il y a quelques années, auraient été hués par la salle. « Nous sommes au congrès de FO, pas à celui de la CFDT, ni de la CGT… Ni à celui du syndicalisme rassemblé… Nous ne pouvons pas décider pour eux ! », a déclaré Yves Veyrier.
« Celle qui a recherché l’unité syndicale, c’est bien FO », a-t-il ajouté. Le syndicaliste n’a pas nommé la CFDT, mais c’est bien d’elle qu’il parlait lorsqu’il a précisé qu’il ne s’agissait « pas [de] l’unité limitée à l’intersyndicale devenue permanente sous l’égide de la CGT avec la FSU et Solidaires » et depuis peu l’Unsa. Peu avant de passer la main, le leader de Force ouvrière a tenté de rassembler l’ensemble des organisations syndicales sur un texte contre la réforme des retraites. L’initiative a été contrariée par la déclaration de la CGT en soutien de Nupes aux élections législatives . Il reste maintenant à voir si Frédéric Souillot va reprendre le flambeau.