C’est l’épilogue de l’une des affaires les plus retentissantes en matière de redressement à l’impôt sur la fortune (ISF). Mercredi, la Cour de cassation a tranché le contentieux « Finaréa », du nom d’une société qui investit dans des PME. La justice a donné raison à l’administration fiscale contre les contribuables. Ce verdict était d’autant plus attendu qu’il intervenait après un impressionnant ballet judiciaire devant plus de 50 tribunaux et cours d’appel dans tout l’Hexagone. La procédure avait débuté il y a près de dix ans, si bien que certains des protagonistes clés alors en poste à Bercy ont quitté la fonction publique depuis.
Ce dossier concerne plus d’un millier de contribuables. Ces particuliers se sont vus infliger un redressement fiscal d’environ 25 millions d’euros au total, après avoir souscrit au capital de holdings montées par la société Finaréa, créée en 2008, dans le sillage de la loi Tepa , qui a étendu à l’ISF le dispositif de réduction d’impôt sur le revenu. L’objectif de cet « ISF-PME » était d’inciter les ménages fortunés à soutenir les PME en leur permettant d’effacer jusqu’à 50.000 euros d’impôt.
Holdings animatrices
Problème : le fisc a remis en cause le bien-fondé des réductions d’impôt auxquelles les souscripteurs de Finaréa pensaient avoir droit. Ils étaient d’autant plus convaincus de pouvoir en bénéficier que la société leur avait délivré des attestations « ISF-PME ». Mais les services de Bercy n’en ont pas tenu compte et ont buté sur la notion de « holding animatrice » , essentielle au dispositif. Ils ont estimé que le rôle « d’animation » de ces « holdings ISF », autrement dit leur implication réelle auprès des PME, n’était pas établi.
La société Finaréa a, quant à elle, fait l’objet d’un traitement favorable de la part de Bercy, qui a mené des contrôles approfondis. « A chaque fois, le fisc a validé le rôle d’animation et accepté les demandes de remboursement de crédit TVA », soulignent les avocats des contribuables. « Aucune amende pour fourniture d’attestations mensongères de la part des holdings à des contribuables n’a par ailleurs été infligée ! » Incohérence ?
La Cour de cassation ne s’est pas penchée sur cette question. Mercredi, elle s’est rangée du côté de l’administration dans les six arrêts qu’elle a rendus. Son argumentaire s’est concentré sur deux points : la valeur des attestations délivrées aux contribuables et le concept de « holding animatrice ».
Attestation fiscale
Concernant l’attestation, la Cour a jugé que « si la remise de ce document est une formalité nécessaire à l’obtention de l’avantage [fiscal], elle ne suffit pas à démontrer que les conditions […] sont réunies et ne confère aucun droit au contribuable à bénéficier de la réduction d’impôt à laquelle il prétend ».
Une interprétation que les avocats des souscripteurs considèrent comme dangereuse. « Comment un contribuable de 80 ans qui habite en province peut démontrer que le montage réalisé à Paris par la société est bien conforme ? » Ils estiment que cette décision risque même de créer une insécurité juridique dont l’Etat n’a pas besoin à l’heure où il veut inciter les Français à engager des rénovations dans leur logement, grâce à des coups de pouce fiscaux. « Qui aura encore confiance dans les attestations délivrées par les sociétés de BTP ? »
Sur la question de l’animation, la Cour a considéré que tant que la holding n’a pas pris de participation dans une PME, le souscripteur au capital de cette holding ne peut profiter d’une réduction d’ISF, en dépit de la mécanique d’amorçage ou de démarrage propre à ce type d’investissement.
Le coup est rude pour les contribuables. Ils espèrent que les Cours d’appel vers lesquelles l’affaire est renvoyée et celles qui n’ont pas encore rendu de décision ne suivront pas la Cour de cassation. Jusqu’à ce jour, 45 juridictions sur 53 leur avaient donné raison.