Recherche infirmiers, aides-soignants, auxiliaires de vie et autres métiers du grand âge. Alors que les besoins croissent, la France est l’un des pays les moins bien pourvus en professionnels de la dépendance, selon un rapport de l’Organisation de coopération et développement économiques (OCDE) publié lundi. En 2016, on ne trouvait dans l’Hexagone que 2,3 travailleurs pour 100 personnes âgées de plus de 65 ans contre 5 en moyenne dans les 28 pays observés.
La France arrive en queue de peloton avec trois pays méditerranéens (Italie, Portugal, Grèce) et deux pays d’Europe de l’Est (Slovaquie et Pologne). Ce retard « aboutit à des listes d’attente pour l’accès au soin et à des capacités insuffisantes par rapport aux besoins », selon l’organisation internationale.
Plans Alzheimer
Cela place la France en mauvaise posture pour aborder la transition démographique. La proportion de personnes âgées de plus de 80 ans, très susceptibles d’être dépendantes, devrait en effet passer de 5 % à 10 % de la population des pays de l’OCDE en 2050, prévoit ce rapport. D’où la hâte des parlementaires à voter début juin la création de la « cinquième branche » de la Sécurité sociale consacrée à la dépendance , après des années d’atermoiements, et l’annonce la semaine dernière par le ministre de la Santé, Olivier Véran, de 1 milliard d’euros de financements supplémentaires dès 2021.
Certes, la France a tenté de redresser un peu la barre en recrutant en 2011-2016, alors que les effectifs rapportés à la population âgée stagnaient dans l’OCDE. Cela s’explique en grande partie par quatre plans Alzheimer successifs depuis 2003, qui ont permis des ouvertures de lits en Ehpad.
Rendre les métiers plus attractifs
Néanmoins, il faudra recruter 200.000 travailleurs de plus en vingt ans dans l’Hexagone, rien que pour éviter que ce ratio déjà trop bas ne se dégrade encore. Soit une hausse de 90 % des effectifs d’ici à 2040, a minima, contre 60 % requis en moyenne dans l’OCDE. En réalité, l’effort devra être supérieur, pour combler les places vacantes, faire face au turn-over, et remplacer les départs à la retraite. En octobre, la mission El Khomri a estimé qu’il faudrait former 352.000 aides-soignants et accompagnants sur cinq ans.
Comment faire, à l’heure où les instituts de formation au métier d’aide-soignant peinent à faire le plein ? Augmenter les salaires permettrait de rendre les métiers plus attractifs, expose l’OCDE, qui note que le salaire horaire, de 9 euros bruts en moyenne dans le grand âge, est nettement inférieur aux 14 euros du secteur hospitalier. Il faudrait aussi sortir l’emploi de sa précarité, alors que 45 % des effectifs exercent à temps partiel.
Montée en compétence
Autre impératif : lutter contre la souffrance au travail. En France, plus de 85 % du personnel dit être exposé à des facteurs de risques physiques (mal au dos, troubles musculo-squelettiques) ou mentaux (stress psychique), et près de 20 % témoignent de problèmes de santé liés au travail.
En améliorant la qualité des emplois, la productivité pourrait croître, ce qui réduirait le besoin de recrutement, note aussi l’OCDE. Cela passe par une montée en compétence des professionnels, souvent trop peu qualifiés par rapport aux besoins. On recherche par exemple des infirmiers spécialisés en gériatrie. Il faudrait également investir dans les technologies, et faire travailler ensemble les soins à domicile, les Ehpad, les hôpitaux. Sachant qu’en France, avec 81 % des professionnels travaillent en institution, un record, une telle coopération est un vrai défi.