L’inflation s’installe dans la durée, plus forte que prévu, la croissance économique ralentit dans l’Hexagone , plombée par les répercussions de la guerre en Ukraine. Dans ce contexte de plus en plus morose, les chefs d’entreprise français commencent à ressentir, à l’image de leurs homologues européens , les affres de la crise qui pointe.
L’indice PMI Flash de l’activité globale en France a chuté de plus 4 points en juin, tombant à son plus bas en cinq mois, à 52,8 points. Rien d’alarmant encore, puisqu’au-dessus de 50, l’indice reflète une activité toujours en expansion . Néanmoins, « la croissance du secteur privé a très nettement marqué le pas en juin », commente dans un communiqué Joe Hayes, Senior Economist à S&P Global Market Intelligence. Il enregistre sa plus faible expansion de l’activité depuis le début de l’année et « la détérioration de la conjoncture est générale », relève l’expert qui voit dans ces données « des risques tangibles de récession en France ».
Contraction de la production manufacturière
Dans l’industrie manufacturière, le PMI Flash est ainsi tombé de 54,6 en mai à 51 en juin. Pour la première fois depuis l’automne dernier, la production se contracte même, avec un PMI à 45,7, en recul de 4,3 points. Un plus bas depuis vingt-cinq mois, souligne S&P GMI. Les usines françaises font face à un recul de la demande tout en restant engluées dans des difficultés d’approvisionnements qu’elles espéraient voir disparaître progressivement cette année.
Ce mercredi encore, le constructeur automobile Stellantis a d’ailleurs annoncé l’arrêt de la production dans plusieurs usines jusqu’au 1er juillet, faute de disposer des semi-conducteurs indispensables à la fabrication.
Et signe de mauvais augure : pour la première fois depuis l’automne dernier, les nouvelles commandes ont fortement diminué au mois de juin, selon S&P GMI, qui pointe un net repli de la demande étrangère.
Incertitude politique
Les perspectives se dégradent également dans les services. L’activité continue certes d’y progresser, mais la croissance a « fortement » ralenti. Au climat anxiogène créé par l’enlisement du conflit en Ukraine et à la dégradation de la conjoncture économique s’ajoute « la montée de l’incertitude politique » analyse S&P GMI qui a recueilli les réponses des chefs d’entreprise entre le 13 et le 21 juin. Alors qu’ Emmanuel Macron a été privé d’une majorité absolue à l’Assemblée par les Français, la confiance des dirigeants chute en effet à son plus bas niveau depuis dix-neuf mois, témoignant sans doute de leurs craintes de voir l’exécutif paralysé dans son action.
Cet effritement du moral des patrons est confirmé par l’indicateur du climat des affaires également publié par l’Insee ce jeudi. Tout en demeurant au-dessus de sa moyenne de longue période, il perd 2 points en juin, à 104. Un vent de pessimisme souffle désormais sur les entreprises des secteurs des services et du commerce de détail qui anticipent une dégradation de leur activité. A contrario, l’institut de statistiques constate une remontée du moral dans l’industrie, les soldes d’opinion relatifs à la production restant en hausse.
Tensions sur les prix
Malgré une légère détente sur les coûts au mois de juin, les très fortes tensions constatées sur les prix des matières premières, du carburant, des transports et des salaires pèsent également sur l’activité. Pour préserver leurs marges, les entreprises qui sont en situation de relever leur prix de vente répercutent les hausses sur leurs clients.
La morosité qui gagne les patrons risque d’avoir des effets sur les perspectives de l’emploi. Les enquêtes de S&P GMI et de l’Insee confirment un ralentissement des créations de postes. Celles-ci resteraient néanmoins soutenues, malgré une croissance en berne. Dans ses nouvelles projections macroéconomiques présentées ce mardi, la Banque de France les évalue à 356.000 cette année contre plus de 500.000 en 2021. Un chiffre qui permettrait néanmoins un nouveau recul du taux de chômage cette année, à 7,4 % , contre 7,9 % l’an dernier, avant une remontée à 7,7 % en 2023.