Le marché du travail ? Pour l’instant et de manière toujours aussi surprenante, il tient. Cela devrait continuer au moins jusqu’à la fin de l’année. Malgré l’inflation qui retrouve son niveau du milieu des années 1980 et les conséquences de la guerre en Ukraine, l’Insee ne s’attend pas à une dégradation de l’emploi et du chômage au second semestre, terme de ses prévisions publiées ce vendredi. Bien au contraire.
Les trois premiers mois de l’année ont déjà de quoi étonner : ils ont permis près de 80.000 emplois salariés de plus. Il s’agit de la cinquième hausse trimestrielle consécutive, même si elle est plus faible que les précédentes, dans un contexte de baisse de l’activité. La suite s’annonce du même acabit, en ligne avec une prévision de croissance de 2,3 % du PIB sur 2022 : 37.000 emplois supplémentaires sont prévus entre fin mars et fin juin, puis 44.000 au troisième trimestre et 41.000 au quatrième.
« L’emploi salarié va ralentir mais en se portant relativement bien », souligne le chef du département de la conjoncture de l’Insee, Julien Pouget, grâce à un rebond de la consommation, une relative résistance de l’investissement des entreprises et une reprise des exportations.
L’Insee note des « anticipations de recrutements en recul depuis quelques mois, mais toujours à des niveaux relativement élevés dans l’industrie et les services », comme en témoignent les derniers chiffres publiés par l’Urssaf marqués par un record de CDI en juin .
Nouvelle hausse des contrats en alternance
Cette dynamique, ajoute l’institut statistique national, serait par ailleurs soutenue par une nouvelle hausse des contrats en alternance, après deux années 2020 et 2021 exceptionnelles . A l’inverse, un net ralentissement est en vue à l’été dans le secteur tertiaire non marchand, dans la santé en particulier, « après avoir été soutenu, les trimestres précédents, par les besoins spécifiques liés à la crise sanitaire ».
Sur l’ensemble de l’année, l’emploi salarié augmenterait donc de 200.000, retrouvant son rythme de progression d’avant la crise sanitaire. S’y ajouteront 60.000 emplois non salariés, soit 260.000 au total et – si tout cela se confirme – un million de postes de plus que fin 2019 !
L’Insee se montre tout aussi optimiste sur l’évolution du taux de chômage. De 7,3 % en moyenne sur le premier trimestre, il diminuerait de 0,1 point les suivants – là encore à un rythme qui était celui d’avant le Covid – pour s’établir à 7 % sur les trois derniers mois de l’année.
L’amélioration résulterait de la bonne tenue de l’emploi, mais aussi d’un ralentissement de la population active qui serait essentiellement porté par les jeunes en alternance, selon le chef de la division synthèse conjoncturelle de l’Insee, Olivier Simon.
Grosse divergence avec la Banque de France
Compte tenu des incertitudes économiques et politiques, on imagine sans peine que le gouvernement se satisfera de ces prévisions, tout à son objectif de parvenir au plein-emploi. D’autant qu’elles diffèrent passablement de celles de la Banque de France.
Malgré une prévision d’évolution du PIB comparable , le scénario central de la banque centrale ne prévoit pour fin 2022 que 35.000 emplois de plus et un taux de chômage de 7,5 %. « Peut-être que dans un contexte de difficultés à recruter, certaines entreprises ne se séparent pas forcément de certains salariés même si leur activité fluctue », avance Julien Pouget pour expliquer ces divergences.