Le Sénat veut en finir avec les « angles morts » des contrôles des Ehpad

Après le scandale Orpea, des sénateurs appellent le gouvernement à lancer des missions de l'IGF et de l'IGAS dans tous les groupes privés de maisons de retraite. Et à mieux coordonner les contrôles sur le terrain.


Les politiques n’ont pas fini de tirer les leçons de l’affaire Orpea . Des sénateurs appellent le gouvernement à déclencher des contrôles financiers au siège de tous les groupes privés lucratifs de maisons de retraite dans les deux prochaines années. Une façon, selon eux, d’en finir avec les « angles morts » des contrôles des maisons de retraite.

« Les autorités de contrôle ne remplissent pas leur mission, en tout cas pas suffisamment », a déclaré mercredi le sénateur de la Loire Bernard Bonne (Les Républicains) à l’occasion de la présentation du rapport d’une mission d’information sur le contrôle des Etablissements d’hébergement pour les personnes âgées dépendantes (Ehpad).

Priorité aux groupes privés

Se défendant de tout « Ehpad-bashing », cette mission a été lancée après que le journaliste Victor Castanet a dénoncé dans un livre paru en janvier la gestion du groupe Orpea et les mauvais traitements qui en découlaient sur des personnes âgées. Depuis, le gouvernement a saisi la justice . Il a également promis de mener des contrôles dans les 7.500 maisons de retraite françaises , publiques et privées, dans les deux prochaines années.

« Ce n’est pas pour nous la priorité », a déclaré Bernard Bonne, le rapporteur de la mission avec Michelle Meunier (Groupe socialiste, écologiste et républicain). « La priorité, c’est surtout de contrôler, sur le plan financier notamment, tous les Ehpad privés lucratifs. On a parlé beaucoup d’Orpea, mais je crois qu’il y a beaucoup à voir aujourd’hui au niveau de tous les autres groupes privés lucratifs », a-t-il insisté.

Centralisation excessive

Concrètement, les sénateurs de la mission d’information préconisent que l’exécutif lance – comme il l’a déjà fait avec Orpea avant de saisir la justice – des audits par les Inspections générales des finances (IGF) et des affaires sociales (IGAS). Et ce dans les deux prochaines années. Les contrôles pourraient ensuite être étendus aux groupes privés non lucratifs voire à des groupes publics.

Les élus considèrent en effet qu’il ne faut pas se contenter de viser les établissements, comme cela est fait aujourd’hui par les Agences régionales de santé, ni se concentrer sur les seules questions de maltraitance mais de débusquer les organisations financières qui pourraient notamment être à l’origine de problèmes sur le terrain.

« Ce qui a été mis en place par Orpea et peut-être par d’autres, c’est une centralisation excessive de tout leur système, les directeurs locaux n’avaient aucune autonomie (…) et personne ne contrôlait le niveau national », a justifié Bernard Bonne.

Utilisation des fonds publics

L’enjeu pour les sénateurs est « d’organiser un dialogue régulier entre les autorités publiques et ces groupes ». Et de s’assurer que l’argent public versé pour la prise en charge des personnes âgées et dépendantes ne soit pas détourné par les sièges, au détriment des résidents. D’où des propositions techniques pour clarifier les règles d’utilisation des fonds publics et mieux les contrôler.

Les élus, dont certaines idées recoupent celles formulées dans d’autres rapports, voudraient également que les contrôles soient davantage coordonnés. Aujourd’hui, outre les Agences régionales de santé, la répression des fraudes (DGCCRF) ou l’inspection du travail peuvent intervenir dans les établissements.

« Il y a des contrôles qui étaient mis en place mais en silo », a insisté Bernard Bonne. D’où la proposition de créer, au niveau national, un comité d’animation des contrôles. Et de le décliner au niveau départemental.

Place croissante du privé

Le rapport s’émeut part ailleurs de la « place croissante des groupes privés dans le secteur des Ehpad », laquelle peut être même prépondérante dans certains départements. « Il faut absolument qu’on limite l’expansion de ces structures privées commerciales », a affirmé Bernard Bonne.

Sachant que l’offre privée peut être chère et donc peu accessible pour un grand nombre de personnes, les sénateurs voudraient que le public puisse « prendre toute sa place ». L’idée serait que les autorités aient davantage leur mot à dire lors des changements de main de maisons de retraite (avec un droit d’opposition aux transferts d’autorisation).

Préconisant un certain nombre de mesures d’ordre législatif et davantage de moyens, les sénateurs n’ont pas manqué de rappeler que la promesse faite lors du précédent quinquennat d’adopter une loi sur le grand âge et l’autonomie n’a toujours pas été honorée .


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