Toujours pas de revalorisation du revenu de solidarité active (RSA), mais de nouvelles mesures ciblées pour aider les plus défavorisés à faire face à la crise. Le Premier ministre Jean Castex a présenté samedi la nouvelle stratégie de lutte contre la pauvreté , lors d’un déplacement à Epinay-sur-Orge (Essonne), dans un centre d’hébergement et de réinsertion Emmaüs.
Il s’agit de « prévenir la bascule dans la pauvreté et à sortir de cette situation » pour ceux qui auraient déjà basculé, en les « amenant vers l’emploi et le logement », a expliqué le chef du gouvernement.
Il a rappelé les dispositions déjà prises par l’exécutif ces dernières semaines, d’un coût de 1,1 milliard d’euros: les bénéficiaires du RSA et de l’ASS (chômeurs en fin de droits) percevront le 27 novembre une aide exceptionnelle de 150 euros, plus 100 euros par enfant à charge – cette dernière aide étant également versée aux familles touchant les aides aux logements. En outre, les jeunes de moins de 25 ans et les étudiants boursiers, soit 1,3 million de jeunes au total, percevront également 150 euros, fin novembre ou début décembre.
30.000 nouveaux postes dans les structures d’insertion
Le Premier ministre a ensuite annoncé que 30.000 nouveaux postes seront créés d’ici à 2022 dans les structures d’insertion par l’activité économique (IAE). Une mesure chiffrée à 150 millions d’euros. La durée du dispositif sera portée « de douze à vingt-quatre mois ». L’IAE permet aux personnes les plus éloignées de l’emploi de bénéficier d’un accompagnement renforcé qui doit faciliter leur insertion professionnelle.
Jean Castex a aussi indiqué que l’Etat allait prendre en charge 80 % du coût des contrats PEC (parcours emploi compétences) dans les quartiers de la politique de la ville et les zones de revitalisation rurales, au lieu de 50 %. Un geste chiffré à 120 millions d’euros.
Un coût total de 700 millions d’euros
Sur le terrain du logement, « afin de prévenir les impayés de loyer, l’Etat va redynamiser l’aide de 150 euros par mois versée par Action Logement, jusqu’ici peu utilisée », a déclaré le Premier ministre, en élargissant les critères d’octroi pour qu’elle bénéficie à un public plus large. Quant aux sans-abri, la campagne hivernale a déjà été avancée au 17 octobre au lieu du 1er novembre.
Au total, Matignon chiffre le coût de ces nouvelles mesures à 700 millions d’euros. Mais le gouvernement a déçu les associations, qui militaient en faveur d’un coup de pouce au RSA, dont le nombre de bénéficiaires est en train de grimper rapidement. Selon le ministre délégué aux Comptes publics, Olivier Dussopt, ils pourraient être 8,7% de plus cette année, et par conséquent dépasser le cap des 2 millions.
Des annonces insuffisantes pour les associations
Les associations de lutte contre la pauvreté ont salué ces annonces, tout en les jugeant nettement insuffisantes. Pour Christophe Devys, qui préside le collectif Alerte regroupant 35 fédérations et associations nationales de solidarité, le gouvernement restesur une « position idéologique », en refusant d’augmenter les minima sociaux. Cette revalorisation, a-t-il souligné, est d’autant plus nécessaire que le RSA n’atteint plus aujourd’hui que 39 % du SMIC, contre 50 % en 1988, au moment de la création du RMI (l’ancêtre du RSA).
La réaction d’ATD Quart Monde, membre du collectif Alerte, a été encore plus vive. Selon cette association, les choix de l’exécutif relèvent d’un «mépris» et d’une «logique éculée consistant à opposer les bons pauvres, à qui l’on donnerait un coup de pouce pour les aider à retrouver le marché de l’emploi, et les mauvais pauvres, à qui l’on distribuerait des miettes».
Pour les associations ou les syndicats, il faut donner un coup de pouce dans la durée au RSA, qui s’élève à 565 euros par mois pour un célibataire sans enfant, et ne permet pas de se hisser au-dessus du seuil de pauvreté. La CFDT réclame 100 euros de plus par mois.
«Je préfère cette aide exceptionnelle massive plutôt qu’une augmentation des minimas sociaux», avait expliqué, il y a dix jours, Emmanuel Macron, en rappelant ses « fondamentaux, la lutte contre la pauvreté par l’activité et le travail». Le RSA a été revalorisé de 10% par François Hollande. Depuis 2018, il suit l’évolution des prix. Il n’a pas été désindexé par le gouvernement Philippe en 2019-2020, contrairement à la plupart des prestations sociales.