Les créations d’emplois reposent désormais très largement sur l’apprentissage

Les deux tiers des 200.000 emplois salariés supplémentaires attendus cette année proviendront de l'alternance, estime l'Insee.


Bien que toujours à la recherche d’une majorité pour légiférer, le gouvernement ne reste pas inactif. Via France compétences, la « banque centrale » de la formation professionnelle née de la réforme de 2018 et dont le conseil d’administration se tient ce jeudi, il va mettre en partie fin au « quoi qu’il en coûte » de l’apprentissage, devenu intenable, comme vient de le rappeler la Cour des comptes .

Comment ? En réduisant de près de 800 millions d’euros la prise en charge des formations en alternance , au risque de porter un sérieux coup au marché de l’emploi.

Valse-hésitation

Très critiqué par les centres de formation d’apprentis (CFA) et une partie du patronat, cet arbitrage est le fruit d’une valse-hésitation ces derniers jours entre le ministère du Travail, Bercy et Matignon. La « cote d’alerte » sur les finances publiques étant « atteinte », selon Bruno Le Maire, l’Etat ne peut plus renflouer France compétences tous les ans. L’exécutif a tranché : il maintient les primes à l’embauche et fait porter les économies sur les centres de formation, estimant que les entreprises continueront à embaucher des jeunes en alternance.

BTP : des apprentis plutôt que des intérimaires

La poursuite de la baisse du chômage dépendra en grande partie du succès ou non de ce parti-pris, étant donnée l’importance désormais prépondérante de l’alternance dans l’évolution de l’emploi en France. Pour s’en convaincre, il suffit de voir comment l’Insee a été obligé de prendre en compte ce type de contrats dans ses statistiques ! Sa dernière note de conjoncture en témoigne.

Il y est rappelé qu’à la fin du premier trimestre, l’emploi salarié a nettement dépassé son niveau de fin 2019, avec 717.000 postes en plus, tous les grands secteurs d’activité (construction, tertiaire marchand et non marchand) étant à la fête, à l’exception de l’industrie. « Environ un tiers de la hausse par rapport à l’avant-crise s’explique par le dynamisme des contrats en alternance, notamment en apprentissage », peut-on lire.

Mardi, Prism’emploi, la fédération du travail temporaire, a souligné en commentant ses perspectives que les employeurs du BTP privilégient désormais le recours à des apprentis plutôt que l’intérim, dans un souci de fidélisation des jeunes. Résultat, une hausse spectaculaire du taux d’emploi des 15-25 ans, alors que la France était très à la peine depuis des décennies sur cette tranche d’âge.

Deux tiers des emplois salariés en plus

Guerre en Ukraine et inflation obligent, les perspectives pour fin 2022 s’annoncent sans surprise moins bonnes pour le marché du travail, sans être catastrophiques. Avec une croissance attendue de 2,3 % du PIB et une légère remontée de la productivité de l’économie française, l’Insee anticipe 200.000 emplois salariés de plus en un an. Mais la hausse, cette fois-ci, sera due à hauteur de 130.000, soit les deux tiers et non plus un tiers, à l’apprentissage.

Conscient de tout cela mais pris par des injonctions contradictoires, le gouvernement marche donc sur des oeufs. Une sortie mal calibrée du « quoi qu’il en coûte » pour ce qui est devenu une vraie politique publique peut avoir de lourdes conséquences, surtout dans la perspective fixée par Emmanuel Macron de parvenir au plein-emploi en fin de quinquennat.


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