C’était une idée pour calmer les « gilets jaunes », augmenter le pouvoir d’achat et mieux rémunérer le travail, mais elle a eu quelques effets pervers. En décembre 2018, le gouvernement a mis en place un dispositif qui vite a pris le nom de « prime Macron » , même si Geoffroy Roux de Bézieux, le président du Medef l’appelle « prime patron » pour montrer que ce sont les chefs d’entreprise qui l’ont concrètement payée. En pratique, les entreprises pouvaient verser une prime exonérée de cotisations sociales et d’impôts, d’un montant maximal de 1.000 euros à leurs salariés gagnant jusqu’à 3 fois le SMIC.
Environ 400.000 entreprises ont saisi l’occasion pour verser environ 2,2 milliards d’euros à 4,4 millions de salariés. Dans une étude publiée ce jeudi, l’Insee montre que plus les entreprises employaient de monde, plus elles ont été nombreuses à utiliser ce dispositif. L’année dernière, 58 % des entreprises de plus de 1.000 salariés ont versé une « prime Macron » alors que celles de moins de 10 salariés ont été seulement 17 % à le faire. Dans la finance ou l’assurance, les employés en ont beaucoup bénéficié. En revanche, dans le commerce, le transport, l’hébergement-restauration ou encore l’industrie agroalimentaire, des secteurs dans lesquels les entreprises sont souvent plus petites, le dispositif du gouvernement n’a été que peu utilisé.
Des effets d’aubaine restés « limités »
Mais certaines entreprises ont, semble-t-il profité d’un effet d’aubaine. Plutôt que d’augmenter les salaires sur lesquels elles paient des cotisations sociales et les salariés qui sont imposés, elles ont préféré verser une « prime Macron », exonérée, elle, de tout prélèvement obligatoire. Ainsi, alors que les augmentations de salaires sont historiquement plus élevées dans les entreprises qui ont versé la prime, les salaires ont plus faiblement progressé entre le premier trimestre 2018 et le premier trimestre 2019. L’Insee en conclut que, même sans le dispositif du gouvernement, ces entreprises « auraient sans doute versé, sous une forme différente, au moins une partie du montant de cette prime ».
D’ailleurs, si l’on exclut la prime, au premier trimestre de l’an passé, le salaire moyen par tête n’a progressé que de 1,3 % alors que, lors des trimestres suivant, la hausse a été supérieure. « Ce qui renforce l’hypothèse d’effets d’aubaine », selon les auteurs de l’étude. Ces derniers seraient « d’ampleur limitée mais différenciés selon les secteurs ».
Les effets d’aubaine auraient été marqués dans la fabrication de biens d’équipement, le transport et l’entreposage, les activités scientifiques et techniques ou encore les services aux ménages. Dans l’industrie, la construction, les services administratifs et information-communication, ils auraient été très faibles. De même, les très grandes entreprises ont eu tendance à augmenter les salaires de la même façon avant et après le versement de la prime et n’ont donc pas profité de ce dispositif pour raboter les hausses de rémunérations.