L’équilibre budgétaire en 2022 promis au début du quinquennat paraît bien loin. Après la crise des « gilets jaunes », et surtout la récession historique provoquée par la pandémie de Covid-19, les ambitions budgétaires d’Emmanuel Macron pour son mandat ont bien changé : désormais Bercy espère ramener le déficit à 4,9 % du PIB en 2022. C’est ce qui ressort du Rapport économique social et financier, document attaché au projet de loi de finances pour 2021 que le gouvernement a fait paraître ce week-end. Tout juste le chef de l’Etat pourra-t-il faire valoir qu’il a au moins tenu parole en matière d’impôts : le taux de prélèvements obligatoires devrait peser à hauteur de 43,7 % du PIB en 2022, soit une baisse de 1,4 point sur le quinquennat quand le candidat Macron avait promis un point.
Avec ce document, l’exécutif trace donc à grands traits, pour la première fois depuis le début de la crise, ce à quoi pourrait ressembler la trajectoire des finances publiques post-coronavirus. Ce solde à – 4,9 % marquerait un net reflux par rapport au -10,2 % attendu cette année, et au -6,7 % prévu pour 2021. La tendance se poursuivrait dans les années suivantes selon le scénario gouvernemental, avec un déficit reculant à 4 % en 2023 et 3,4 % en 2024. Ce n’est donc qu’en 2025 – au mieux ! – que la barre fatidique des 3 % serait à nouveau atteinte, cinq ans après le début de la crise économique, avec un déficit à -2,9 %.
Pas d’éclaircie avant 2025
Dans ce contexte dégradé, il faut donc s’attendre à voir la dette se maintenir au haut niveau qu’elle a atteint avec la pandémie. Après un léger tassement attendu l’an prochain grâce au rebond de la croissance – l’endettement devrait représenter 116,2 % du PIB contre 117,5 % cette année -, ce ratio devrait repartir à la hausse les années suivantes jusqu’à atteindre 117,8 % en 2024. La première légère éclaircie est attendue en 2025 (117,4 %).
Pour parvenir à redresser les comptes, Bercy compte sur un retour durable de la croissance. Après le fort rebond de 2021 (+8 %), il est fait l’hypothèse d’une activité progressant encore de 3,5 % en 2022 puis de 2 % en 2023, avant une hausse de 1,4 % pour les deux années suivantes. Dans ce rapport, alors que la récession sans précédent fait craindre pour la santé de l’appareil productif à la sortie de la crise, Bercy estime au contraire qu’après 2022 « la croissance potentielle serait préservée par le plan de relance ». Ce dernier est censé représenter sur la période 2020-2025 l’équivalent de 5 points de PIB, et le volet consacré à la demande (investissement public, soutien aux ménages, autres dépenses publiques) pèserait environ le tiers de ce total. Après 2022, la quasi totalité du stimulus viendrait du volet offre, grâce notamment à la pérennisation de la baisse des impôts de production.
Renvoi au successeur
Le gouvernement promet aussi quelques économies pour faire redescendre les déficits. Ou, plus exactement, il promet que son successeur les fera. Ce qu’on appelle dans le sabir budgétaire « l’ajustement structurel » ne devrait débuter réellement qu’en 2023. « Cet ajustement pourra intervenir par une meilleure efficacité de la dépense publique ; il n’interviendra pas par des hausses d’impôts », précise le document.
D’ici là, le mot d’ordre en reste au « quoi qu’il en coûte » macronien. Bercy a réévalué à 64,5 milliards d’euros l’impact sur le déficit des aides d’urgence déboursées cette année (contre 57 milliards auparavant). L’an prochain, si l’on fait abstraction de ces mesures d’urgence et du plan de relance, la hausse en volume – c’est-à-dire hors inflation – de la dépense publique sera de 2,9 %, alors que sur toute la décennie précédente, le record était de +1,7 % en 2017.