L’exécutif veut procéder par étapes avant de mettre en oeuvre une promesse de campagne du président. Le gouvernement a fait savoir jeudi dernier qu’il allait lancer « début 2023 des expérimentations » pour tester le versement automatique de prestations sociales.
« Nous allons faire appel à la volonté d’une dizaine de territoires où on mobilisera tous les acteurs concernés », a détaillé le nouveau ministre des Solidarités, de l’autonomie et des personnes handicapées, Jean-Christophe Combe, dans une interview au « Parisien ».
« Je souhaite qu’on ait des premiers résultats d’ici deux ans». Seul le versement automatique du Revenu de Solidarité Active (RSA), de la prime d’activité et des aides personnalisées au logement (APL) seraient testés « dans un premier temps », a cependant précisé le ministre.
Eviter la course aux justificatifs
Baptisé « solidarité à la source », le principe d’un versement automatique vise à simplifier la vie des Français les plus modestes « en limitant les démarches des bénéficiaires », selon Jean-Christophe Combe. Les foyers modestes ou précaires doivent aujourd’hui courir régulièrement après les justificatifs pour obtenir des prestations sociales.
La réforme permettrait aussi d’assurer que les prestations sociales sont bien versées à ceux qui y ont droit. Et ce, alors qu’aujourd’hui beaucoup de Français ne touchent pas les aides qui devraient pourtant leur parvenir.
Près d’un tiers des foyers éligibles au RSA n’avaient ainsi pas fait les démarches nécessaires pour l’obtenir en 2018, a révélé une étude publiée en début d’année. C’est à peine moins que dix ans plus tôt.
« Avec la solidarité à la source, nous mettrons fin à l’injustice sociale du non-recours » a promis la Première ministre, Elisabeth Borne, lors de son discours de politique générale en juillet. « Nous lutterons plus efficacement contre la fraude », a-t-elle aussi assuré.
L’exécutif marche sur des oeufs
L’exécutif marche cependant sur des oeufs. « C’est un sujet complexe qui implique de lourds travaux techniques », a souligné le ministre Jean-Christophe Combe à propos du versement automatique. Notamment pour « permettre la récupération des données auprès des employeurs et des administrations ».
La réforme des aides au logement (APL) menée lors du précédent quinquennat a été reportée plusieurs fois, notamment en raison de difficultés techniques . De quoi inviter l’Etat à la prudence. D’autant qu’un autre chantier délicat doit déjà être mené d’ici au mois d’octobre 2023 : celui de la refonte de l’Allocation Adultes Handicapés (AAH) actée cet été.
Le revenu universel d’activité dans les limbes
En 2018, le président Emmanuel Macron avait déjà annoncé dans le cadre de son plan de lutte contre la pauvreté, une refonte des aides et minimaux sociaux avec l’instauration d’un Revenu Universel d’Activité (RUA).
Initialement présenté comme un projet de fusion des prestations, ce revenu devait voir le jour en 2023 après une longue phase de concertation. La crise sanitaire puis la campagne présidentielle – qui a vu naître le concept de solidarité à la source – semblent avoir eu raison du projet.
Au début de l’année, l’expert en charge du pilotage des travaux sur le revenu universel d’activité expliquait cependant qu’il ne s’agissait pas de fondre les prestations entre elles mais de créer pour les calculer « un revenu social de référence » comme il existe un revenu fiscal de référence.
L’enjeu à ses yeux est que les prestations sociales deviennent plus compréhensibles et plus pilotables. Autrement dit, qu’il n’y ait pas des mauvaises surprises sur l’évolution des prestations quand les ressources d’un bénéficiaire évoluent.