L’aggravation de la crise sanitaire et le second confinement, même allégé par rapport au printemps dernier, couplé aux couvre-feux, n’ont visiblement pas provoqué d’afflux chez Pôle emploi. De manière un peu inattendue, le nombre de chômeurs sans activité, rangés dans la catégorie A, la plus scrutée, a même fait du surplace en décembre en France métropolitaine.
A 3,6 millions en moyenne sur la période – 3,8 millions en France hors Mayotte -, il a même chuté de 2,7 % sur le quatrième trimestre par rapport au précédent, a annoncé ce mercredi la Direction statistique du ministère du Travail, la Dares. Soit 99.000 personnes de moins. Ce recul est nettement moins important que celui observé sur le troisième trimestre (-475.000). Il reste tout de même notable compte tenu de la conjoncture de la fin de l’année. L’Insee attend un recul du PIB de quelque 4 % au quatrième trimestre. Dans le détail, la baisse a été prononcée pour les moins de 25 ans (-5,2 %), un peu moins pour les 25-49 ans (-3,1 %), et faible au-delà (-0,5 %).

Effet bascule entre catégories
Comment l’expliquer ? Contrairement à ce qui s’est passé au troisième trimestre, il ne faut pas y voir, ou pas beaucoup, un effet de bascule vers les catégories B (chômeurs ayant travaillé moins de 78 heures sur le trimestre) ou C (plus de 78 heures). Quand bien même le nombre de ceux qui ont déclaré plus de 120 heures de travail sur la période a augmenté de près de 9 %. La Dares met simplement en avant que le nombre de personnes sorties de ces trois catégories a dépassé celui des entrées, resté stable ce qui est également positif a priori.
« Il y a eu un confinement sur le trimestre, une baisse d’activité, et le chômage qui baisse, c’est effectivement contre-intuitif », confirme Eric Heyer, chercheur à l’OFCE, en allant plus loin dans les explications. La première raison possible, qui serait la pire, tient à la baisse de la population active, conséquence du découragement d’une partie des chômeurs à rechercher un emploi, et donc à disparaître des radars de Pôle emploi. C’est ce que prévoyait mi-décembre l’Insee dans sa dernière note de conjoncture, même s’il faut attendre un peu pour le confirmer.
Effet activité partielle
Deuxième raison avancée, compte tenu du décalage normalement entre baisse d’activité et suppressions de postes, l’afflux d’inscriptions à Pôle emploi reste à venir. L’OFCE estime que cet effet rétention menace 200.000 postes (à ce stade, la Dares en comptabilise 84.100 depuis mars dans le cadre de 804 PSE initiés, soit près de trois fois plus que sur la même période l’année précédente).
En attendant, la protection par l’activité partielle, c’est la troisième raison, continue de jouer à fond. En décembre, 2,4 millions de salariés en ont bénéficié au moins un jour, contre 3,1 millions en novembre, selon la Dares.
Il n’en demeure pas moins que sur un an, les chiffres reflètent bien les conséquences de la crise. Pour la catégorie A, Pôle emploi recense 8,1 % de chômeurs de plus, ce qui fait remonter leur nombre aux niveaux de ceux de fin 2015 et début 2016. Toutes catégories confondues, leurs nombres – 5,7 millions en France métropolitaine ou 6 millions en France entière hors Mayotte – restent à des niveaux jamais atteint.
Déficit public ou cohésion sociale
La crise a frappé en masse les CDD, les intérimaires et a gelé une grande partie des embauches, malgré les aides de l’Etat. Pour l’ensemble de 2020, l’Insee s’attend à 700.000 emplois de salariés ou de non salariés en moins. Rien à voir, pourtant, à ce qui s’est passé lors de la crise financière de 2008, tempère Eric Heyer : le gouvernement d’alors n’avait pas actionné le levier de l’activité partielle et la hausse du nombre d’inscrits à Pôle emploi sans activité avait été très nettement supérieure à ce qu’elle est aujourd’hui.