Accords de Ségur, dernier arpège. Nicole Notat, qui a mis en musique la concertation depuis le 25 mai , doit remettre ce mardi son rapport à Olivier Véran. Dans la foulée, le ministre de la Santé, entouré de la secrétaire d’Etat à l’Autonomie, Brigitte Bourguignon, et des ministres en charge de la Recherche (Frédéric Vidal) et des Territoires (Jacqueline Gourault), va clore le Ségur avec une trentaine de mesures. Ces décisions seront « restructurantes » pour le système de santé, a-t-il promis sur France Info.
Agacé des critiques sur le volet salarial du Ségur , ficelé une semaine auparavant, Olivier Véran a d’abord souligné l’importance de l’effort financier consenti. Une infirmière pourra gagner plus de 450 euros par mois en cumulant les 183 euros nets de revalorisation, la révision des grilles et les nouveaux forfaits d’heures supplémentaires, a-t-il fait valoir.
6 milliards d’investissement
De plus, le ministre s’apprête à dévoiler un plan de 6 milliards d’euros d’investissements dans l’hôpital public et privé et le secteur médico-social, s’ajoutant à la reprise de 13 milliards d’euros de dette des établissements (dont 3 milliards de frais financiers), qui devrait dégager plusieurs centaines de millions d’euros de capacité d’autofinancement chaque année. Le plan d’investissement s’étalera-t-il jusqu’en 2022 comme la reprise de dette, ou jusqu’en 2024 ? La Fédération hospitalière de France (FHF) réclamait au départ près de 2 milliards d’argent frais par an.
Mais le but du Ségur n’était pas uniquement de parler de gros sous. La crise du coronavirus a montré que l’hôpital était plus efficace lorsque les professionnels de terrain se voyaient confier les responsabilités. D’où la demande d’une réforme de la gouvernance. « Nous allons débureaucratiser, nous allons simplifier », a promis lundi Olivier Véran.
Fin de non-recevoir sur la gouvernance nationale
Le fonctionnement des établissements peut être amélioré : par exemple, ne pas imposer la création de pôles dans un hôpital local, assouplir les contraintes des marchés publics, permettre aux services d’acheter du petit équipement. Mais Marc Bourquin, conseiller stratégie à la FHF, déplore la « fin de non-recevoir » opposée jusqu’à présent à la demande d’une simplification de la gouvernance nationale. « Ce n’est plus possible d’avoir une politique du ministère et une politique de l’Assurance-maladie, plus une administration centrale distincte pour l’hôpital ou le médico-social », regrette-t-il.
Côté gouvernance hospitalière, un modus vivendi semble avoir été trouvé entre les administratifs et les médecins. « Nous sommes très favorables aux propositions du rapport Claris sur la codécision, la dénomination et le renforcement du rôle des services », commente Thierry Godeau, président de la conférence des présidents de commission médicale d’établissement. Autrement dit, le directeur général peut bien être un haut fonctionnaire, si les médecins sont associés au choix des chefs de service ou de pôle et consultés en amont sur les grandes orientations financières. « Cela permettrait à tous d’être au clair sur les contraintes budgétaires qui pèsent sur les décisions du management », approuve Marc Bourquin.
Projets territoriaux de santé
Néanmoins, les infirmiers veulent eux aussi être associés aux décisions. « Nous voulons intégrer tous les étages de la gouvernance, jusqu’au conseil d’administration », insiste Patrick Chamboredon, le président de l’Ordre des infirmiers. Pour commencer, il propose que les directeurs de soins, des infirmiers, soient élus comme les présidents de commission médicale d’établissement, au lieu d’être désignés par le directeur général.
Enfin, le monde de la santé attend que le gouvernement concède plus de responsabilités aux soignants de terrain, dans et hors de l’hôpital. « Nous espérons que la mise en place d’un projet territorial de santé sera systématisée, voire obligatoire, pour sortir d’un financement technocratique et partir des besoins de santé réels de la population », explique Marc Bourquin. La FHF table sur 100 à 150 projets de ce type, coûtant chacun environ 1 million d’euros. Grâce à eux, « on pourrait remettre des lits de médecine dans les hôpitaux locaux qui en ont perdu à cause d’une logique purement comptable », conclut-il. L’une des revendications des soignants grévistes depuis plus d’un an.