Quel avenir pour la dette Covid ?

Cantonnement, annulation, émission d'une dette perpétuelle… Alors que la troisième vague de coronavirus touche la France, la question du remboursement de la dette Covid se fait de plus en plus présente dans le débat public. Tour d'horizon avec CQFD, le format pédagogique des « Echos


Chômage partiel, aides aux entreprises, plans de soutien au secteur de la culture, de l’automobile, du tourisme ou de l’aéronautique, mais aussi achats de masque, de vaccins, prise en charge des tests de dépistage par la Sécurité sociale… depuis le début de la crise sanitaire, le gouvernement débloque sans compter pour soutenir une économie sous cloche depuis plus d’un an. Ce déferlement des dépenses de l’Etat pèse sur la dette française.

En 2020, cette dernière a explosé. La troisième vague, à laquelle la France est désormais confrontée devrait encore alourdir les dépenses. L’exécutif cherche des pistes pour sortir du « quoi qu’il en coûte ». A quoi pourraient-elles ressembler ? Les explications de CQFD, le format pédagogique des Echos.

1) Quelle est la situation de la France ?

La crise sanitaire a considérablement alourdi la dette française. Fin 2018, cette dernière s’établissait à 2.315,3 milliards d’euros. Exprimée en pourcentage du produit intérieur brut (PIB) elle s’établissait à 98,4 %. Deux ans plus tard, fin 2020, la dette publique franchissait le seuil des 100 %. Autrefois taboue, cette limite n’est désormais plus qu’un souvenir. Début 2021, la dette publique atteignait près de 120 % du PIB, avec une hausse en valeur de près de 300 milliards d’euros.

« Entre les pertes de recettes et les dépenses que nous avons engagées pour faire face à la crise, que ce soit pour l’Etat en termes de dépenses, pour la Sécurité sociale en termes de pertes de recettes liées à la baisse de l’activité, le coût […] peut être estimé autour de 160 à 170 milliards d’euros », détaillait récemment au Sénat Olivier Dussopt. Et ce chiffre n’est pas « définitif ». « Nous sommes encore dans la crise sanitaire et épidémique », précisait alors le ministre des Comptes publics. La dette ne devrait donc pas s’alléger dans les semaines à venir. Cette année, elle devrait encore gonfler à 122,4 % du PIB, du fait de nouvelles dépenses pour soutenir l’économie, prévoit le gouvernement.

2) Comment la France se finance-t-elle ?

L’argent débloqué par le gouvernement est loin d’être magique. En période de Covid, ou non, le mécanisme de financement de la France est toujours le même. Quand le pays a besoin de financement, il emprunte sur les marchés financiers.

C’est l’Agence France Trésor qui est en charge des opérations. Elle émet sur le marché des obligations et des bons du Trésor. Des investisseurs privés prêtent de l’argent à l’Etat, en échange de ces titres. En contrepartie, la France s’engage à payer des intérêts, et à rembourser la somme dans un laps de temps défini.

La France est le premier émetteur de dette de la zone euro, si l’on cumule la dette souveraine (de l’Etat) et celle des entreprises. Une force, car cela signifie que la dette française est attractive. Une attractivité qui s’explique par le fait que la France honore ses engagements. En clair, la dette française est considérée par les investisseurs comme une valeur sûre. Mais alors, si la France parvient toujours à rembourser, pourquoi vouloir alléger la dette ?

3) Faut-il limiter l’endettement ?

L’endettement de la France est considéré comme soutenable actuellement. Jusqu’à quand ? Une commission d’experts indépendants, présidée par Jean Arthuis, et installée en décembre par le Premier ministre, Jean Castex, estime que la dette passerait de 120 % en 2020 à 133 % en 2030 et même 150 % en 2045.

Pour les experts, cette dynamique est « préoccupante ». Le rapport insiste sur la nécessité de « faire en sorte que les dépenses augmentent moins vite que les recettes ».

« Si l’on regarde la situation de l’endettement de la France, il y a une tendance lourde à l’augmentation et en soi cela n’a rien de désirable », estimait également fin janvier l’économiste Olivier Blanchard, qui travaille actuellement à un rapport sur l’économie de l’après-Covid, destiné à Emmanuel Macron. Car si la dette ne coûte quasiment rien à la France, grâce aux faibles taux d’intérêt, la prudence est de mise. « L’incertitude sur les taux d’intérêt n’est pas négligeable », rappelait récemment aux « Echos » Olivier Blanchard.

4) Quelle est la position du gouvernement ?

Lundi soir, devant l’Assemblée nationale, le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, a présenté sa feuille de route afin d’amorcer le remboursement de la dette Covid. Au centre de sa stratégie, une idée forte : isoler la dette Covid du reste de la dette française. Ce cantonnement de la dette a été régulièrement plébiscité par Bercy depuis le mois de juin, alors que la question du remboursement de la dette commençait à émerger dans le débat public.

Pour la rembourser, le ministre écarte la création d’une taxe, comme cela fut le cas en 1996 pour résorber l’endettement de la Sécurité sociale. Bruno Le Maire compte plutôt sur une partie des recettes issues du retour de la croissance. A cela s’ajouteraient plusieurs réformes, dont celle des retraites, pour assainir les comptes publics.

5) Quelles sont les pistes évoquées ?

Mais la proposition du ministre ne fait pas l’unanimité. Dans leur rapport, les experts de la Commission présidée par Jean Arthuis, excluent l’idée d’un cantonnement de la dette. « Il faudrait alors trouver une recette en face pour le remboursement, et donc un impôt nouveau, ce qui nous semble exclu compte tenu du niveau d’imposition », juge Jean Arthuis.

Le sujet alimente le débat, et certains se positionnent pour une annulation d’une partie de la dette, celle détenue par la BCE. Les défenseurs de l’idée estiment que ce serait une solution au financement de la reconstruction écologique et sociale. Arnaud Montebourg ou Jean-Luc Mélenchon se sont notamment prononcés pour cette solution.

Mais l’idée en fâche aussi certains. Christine Lagarde, la présidente de la BCE a qualifié cette option « d’inenvisageable ». La commission Arthuis rejette aussi l’idée, et estime que le choix de cette solution serait « une grave erreur qui hypothéquerait l’avenir ». 

Autre solution : émettre une dette perpétuelle, c’est-à-dire à très longue échéance. Mais là encore, l’idée peine à convaincre. Le rapport Arthuis estime ainsi que la demande des investisseurs ne serait pas au rendez-vous. Le débat est en tout cas lancé, et pourrait même devenir un thème majeur de l’élection présidentielle de 2022.


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