Les Français ne se font guère d’illusion sur le « monde d’après » : ils s’attendent à une violente crise économique. Selon un sondage Elabe pour « Les Echos », Radio classique et l’Institut Montaigne, plus d’un Français sur deux (56 %) pense qu’il va y avoir un choc majeur, avec une envolée des faillites et du chômage.

Pour le reste de l’opinion, la vision des prochains mois n’est guère plus réjouissante. Au total, 36 % des personnes interrogées s’attendent à une période difficile pendant quelques mois, mais pensent que cela va s’améliorer. « Les Français sont inquiets, mais pas abattus, car presque 40 % d’entre eux pensent que cela va rebondir », analyse Bernard Sananès, le président d’Elabe.
Inquiétude forte chez les cadres
L’élément particulièrement frappant est que cette inquiétude est partagée par toutes les catégories socioprofessionnelles, y compris les plus favorisées, qui se montrent habituellement plus optimistes dans les sondages.
« C’est plutôt rare de voir les cadres aussi inquiets sur les questions économiques. Cela accrédite l’idée que la crise va aussi toucher les agglomérations et les sièges sociaux », indique Bernard Sananès. En région parisienne, où se concentre une majorité des emplois de cadres, 64 % de la population s’attend à une crise majeure, soit 8 points de plus que la moyenne nationale.
Face à cette situation, les Français s’attendent à de nouvelles hausses d’impôts, malgré les annonces répétées de plusieurs ministres sur une poursuite de la baisse de fiscalité. Près de huit Français sur dix jugent que ces promesses ne sont pas crédibles. Ce doute est partagé, y compris par les électeurs d’Emmanuel Macron qui sont 68 % à ne pas y croire.
Adhésion pour la taxe Gafa
Paradoxalement, les Français seraient partisans de certaines hausses d’impôts pour sortir de la crise, avec deux cibles privilégiées : les Gafa et les plus fortunés. La taxation du numérique , soutenue par 85 % des personnes interrogées, emporte une large adhésion. Même chose pour le rétablissement de l’impôt sur la fortune, qui recueille 70 % d’opinions favorables.
A une différence près : l’imposition des Gafa dépasse les clivages politiques, alors que celle des plus fortunés n’obtient pas le soutien de la droite, et dans une moindre mesure des électeurs d’Emmanuel Macron en 2017. « L’attente de l’opinion est forte sur l’imposition des plus aisés, mais pas du côté de l’électorat qui soutient le plus le chef de l’Etat sur sa politique économique. Ce sera compliqué pour lui de faire du « en même temps » dans ce domaine », estime Bernard Sananès.
Signal à gauche sur l’écologie
Ce serait plutôt sur la question de l’écologie qu’Emmanuel Macron pourrait envoyer un signal à gauche, plus que sur la problématique fiscale. On aurait pu penser que l’inquiétude sur la situation économique ferait passer l’écologie au second plan chez les Français. Ce n’est pas ce qui ressort de ce sondage. Pas moins de 58 % des personnes interrogées pensent que les deux objectifs doivent être conciliés, sachant que seulement 26 % considèrent que le redémarrage de l’économie doit être prioritaire.
« Dans ce domaine, les Français veulent du « en même temps ». Ce peut être une voie intéressante pour Emmanuel Macron », observe Bernard Sananès.